En continu Procès Monsanto

Un verdict très attendu

08.08.18

Monsanto devra-t-il payer des centaines de millions de dollars pour avoir caché la dangerosité de son désherbant au glyphosate, le RoundUp, comme le plaide Brent Wisner, l’avocat de Dewayne Johnson, un Américain de 46 ans malade d’un cancer en phase terminale ?

Après une journée consacrée aux plaidoiries mardi, les jurés devaient commencer mercredi leurs délibérations dans ce procès tenu devant un tribunal de San Francisco (ouest), le premier à mettre sur le banc des accusés le géant agrochimique et les liens possibles entre le cancer et ses produits au glyphosate. Pour Brent Wisner, l’avocat de Dewayne Johnson, qui pense que son cancer incurable est dû au RoundUp et à sa version professionnelle le RangerPro, le « jour de rendre des comptes » est venu pour Monsanto. Toutes les découvertes sur les risques cancérigènes « ont connu ce moment : lorsque la science finalement fait ses preuves, quand on ne peut plus (les) dissimuler« , a dit Me Wisner mardi. Pour lui, Monsanto a fait passer ses profits avant la santé publique en bataillant contre des études faisant état de risques cancérigènes autour du RoundUp, vendu depuis plus de 40 ans.

Comme pour le tabac et l’amiante

Et d’établir un parallèle entre ce dossier et les stratégies utilisées dans le passé par les industriels pour nier la dangerosité du tabac ou de l’amiante. « Pour le tabac, nous connaissons la fin de l’histoire, et nous savons comment se finira l’histoire pour Monsanto« , a-t-il aussi affirmé, expliquant qu’il n’est pas nécessaire dans ce procès « de démontrer que le RoundUp est la seule cause (du cancer de son client) mais (…) seulement qu’il y a contribué« . Si Monsanto est condamné, il « devra faire quelque-chose, mener des études qu’il n’a jamais faites, et alerter les gens« , a encore dit l’avocat.

Le plaignant, qui a vaporisé ces produits entre 2012 et 2014 dans le cadre de son travail dans des écoles californiennes, réclame à Monsanto plus de 400 millions de dollars en dommages et intérêts mais surtout en sommes « punitives« . Pour Monsanto, qui vient d’être racheté par l’allemand Bayer, il n’y a aucun lien entre cancer et glyphosate et donc aucune raison d’avertir d’un danger quelconque à propos de cette substance très controversée. « Il y a eu beaucoup de grande rhétorique ici (pour dire) à quel point les choses sont horribles chez Monsanto« , a argumenté mardi son conseil George Lombardi. Mais « à moins que (Me Wisner) le relie au cancer de M. Johnson, rien de tout cela ne signifie quoi que ce soit« , a-t-il asséné, notant que le diagnostic était intervenu très peu de temps après l’utilisation des produits et que donc, la maladie était plus vraisemblablement antérieure. « Ce que disent les preuves est clair, son cancer n’a pas été causé par le Ranger Pro, » a-t-il insisté.

Pendant plus d’un un mois, les deux parties se sont affrontées à coups d’études scientifiques contradictoires. S’il avait su que le produit était possiblement dangereux, M. Johnson n’aurait « jamais » utilisé du RoundUp et du RangerPro, avait témoigné ce dernier durant ce procès. Ce père de deux enfants avait également longuement évoqué son cancer, un lymphome non hodgkinien incurable diagnostiqué en 2014 et indiqué avoir appelé, inquiet, deux fois Monsanto sans jamais être recontacté.

Si ce procès civil est le premier du genre, des milliers de procédures sont en cours aux États-Unis sur le même sujet, à des degrés divers d’avancement. M. Johnson était chargé de diluer du RangerPro dans de l’eau puis de vaporiser la solution (parfois des centaines de litres par jour) pour tuer les mauvaises herbes à l’aide d’un vaporisateur électrique. Le glyphosate fait l’objet d’études et de décisions contradictoires depuis de nombreuses années. Contrairement à l’agence fédérale américaine de protection de l’environnement (EPA), la Californie, où se trouve San Francisco, a placé le glyphosate sur la liste des produits cancérigènes. Le glyphosate est aussi classé « cancérigène probable » depuis 2015 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), mais pas par les agences européennes, l’Efsa (sécurité des aliments) et l’Echa (produits chimiques). Plébiscité par les cultivateurs pour son efficacité et son faible coût, il fait particulièrement polémique en Europe et notamment en France.
Par Glenn Chapman pour AFP

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