Culture food La BnF gourmande

Le chocolat à l’affiche

Fondée en 1816 par Jean Antoine Brutus Menier (1795-1853), la Maison Menier devient, au cours du XIXe siècle, un véritable empire. L’une des clefs du succès du chocolatier est la conscience de l’importance de la publicité. Si celle-ci prend de multiples formes, jusqu’aux plus innovantes, les affiches de Firmin Bouisset et leurs variantes sont restées célèbres.

D’après Firmin Bouisset, Chocolat Menier pour croquer. Sa tablette « Rialta » pour croquer, affiche, Imprimerie de Vaugirard, Paris, 1925. Lithographie en couleurs, variante en 194 x 125 cm et avec la couleur rouge. Bibliothèque nationale de France, ENT DN-1 (BOUISSET,Firmin)-GRAND ROUL

La publicité est d’abord employée par la firme pour lutter contre de nombreuses contrefaçons, en circulation dès 1845. En 1849, Menier dépose sa tablette et son étiquette afin d’en conserver la propriété exclusive. Les premières campagnes de la marque présentent le dessin très précis des deux faces d’une tablette afin d’en faciliter l’identification.

Chocolat-Menier. Les contrefaçons nombreuses du Chocolat-Menier nous engagent à présenter ci-contre un dessin des deux faces d'une tablette, affiche pour le chocolat Menier, typographie Henri Plon, imprimeur de l’Empereur, rue Garancière, 8 (Paris), 1860

On retrouve cet emballage caractéristique sur les affiches imaginées en 1892 par l’illustrateur Firmin Bouisset (1859-1925), également auteur des célèbres publicités pour les biscuits LU mettant en scène un écolier. Une fillette aux nattes brunes (dont le modèle est Yvonne, fille de l’artiste), inscrit le message publicitaire, très sommaire. A ses pieds, un panier contient les tablettes de chocolat Menier.

Firmin Bouisset, Chocolat Menier, affiche. [Variante d’image : sans parapluie ; variante de tirage : Mention Affiches Camis en bas à gauche de l’affiche]. Affiches Camis, 58 r. St Sabin (Paris), 1892.

Voir aussi cette variante de tirage (1892), cette variante de texte (1892), cette variante en arabe (1893), cette variante avec parapluie (1893).

Le slogan comme le visuel connaissent, au fil du temps, un grand nombre de variations. L’enfant écrit tantôt sur un mur, tantôt sur une vitrine, avec ou sans parapluie, de dos ou de face, la teinte des vêtements varie.

D’après Firmin Bouisset, Chocolat Menier, affiche. Affiches Camis (Paris), retirage de 1978.

En 1895, c’est Auguste Roedel (1859-1900) qui propose sa vision du sujet.

Auguste Roedel, Chocolat Menier, 5c, 10c en vente partout, affiche. Imp. Farradesche (Paris), 1895

L’enseigne Menier s’affiche partout : dans la presse comme dans la rue, notamment sur les colonnes Morris ou sur des plaques de tôle, mais aussi sur des menus, des tampons-buvards, des éventails, des piluliers ou des boîtes en fer. L’entreprise Menier s’intéresse même à l’une des innovations technologiques marquantes de la toute fin du XIXe siècle : l’enregistrement sonore. Henri Lioret, horloger de talent, a l’idée de réaliser des kiosques parlants miniatures, susceptibles d’être posés sur les comptoirs d’épicerie. Couverts de mini-publicités pour le chocolat Menier (« What else? »), ils intègrent un enregistrement de quelques secondes (1898) qui délivre le slogan du fabricant : « Le chocolat Menier est le meilleur de tous les chocolats ! Demandez le chocolat Menier ! »

Pour se développer, la marque s’appuie sur la publicité autant que sur les progrès techniques. Dès 1871, l’usine hydraulique de Noisiel, sur la Marne, s’est considérablement transformée : le bâtiment de fer et de brique, conçu par Jules Saulnier, a été mis en chantier. Dotée de tout le confort moderne, l’usine devient l’une des chocolateries les plus importantes de France. Grâce à l’achat de plantations et de bateaux, l’entreprise contrôle toute la chaîne de production du chocolat.
À l’occasion de l’Exposition universelle de 1889, elle édite une brochure qui décrit le fonctionnement de son usine modèle. La même année, le Génie civil décrit minutieusement, illustrations à l’appui, l’atelier de torréfaction, le broyage, le pesage, le moulage, le démoulage, le pliage et l’empaquetage des tablettes. Le site de Noisiel est aussi exceptionnel pour son esthétique, dont témoignent ses décorations en céramiques colorées, insérées dans les murs et le toit de tuiles vernissées. Plus de mille cinq cents ouvriers, dont six cents femmes, y travaillent alors. Afin de retenir la main-d’œuvre, la Maison Menier construit, à partir de 1874, une cité ouvrière à proximité de l’usine, toujours debout aujourd’hui.

*Isabelle Degrange, Chargée de collections en Gastronomie (département Sciences et Techniques)
Bibliothèque nationale de France

*Audrey Viault, Chargée des collections d’archives sonores (département Son, Vidéo, Multimédia)
Bibliothèque nationale de France

Pour aller plus loin :

La chocolaterie Menier, Noisiel, Seine-et-Marne. Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France, Paris, Association pour le patrimoine d’Ile-de-France, 1994.
– Bernard Logre, Chocolat Menier, évitez les contrefaçons !, Boulogne-Billancourt, Du May, 2005.
– « Le développement de l’industrie chocolatière en France » sur le blog Gallica. En ligne.
– « La chocolaterie Menier » sur le blog Gallica. En ligne.
– « La chocolaterie Menier » sur le site Passerelles de la BnF. En ligne.
– Bibliographie de la BnF sur le chocolat. En ligne.
– Voir le Lioretgraph kiosque Menier en fonctionnement sur le site du Phonorama. En ligne.
– Les cylindres Henri Lioret dans les collections de la BnF. En ligne.

 

Partagez moi !

Vous pourriez aussi être intéressé par

Culture food

Le changement climatique menace la culture du café, mais les variétés sauvages ouvrent de bonnes perspectives

03.01.25
Quoi de mieux pour commencer l'année qu'un bon café! Alors que le changement climatique menace l’industrie du café, scientifiques et agriculteurs se tournent vers les espèces sauvages pour trouver des solutions. C'est ce que l'on découvre dans un article...

Culture food La BnF Gourmande

Petits et grands cocktails…en 1929

07.02.25
Qu’il ait été dry ou non, january est maintenant terminé.  Il est donc temps de découvrir, grâce à la BnF, l’étonnant ouvrage Petits et grands verres : choix des meilleurs cocktails, dans une édition de 1929.

Culture food

35 nuances de l’élevage

06.12.24
N'en déplaise à tous ceux qui n'aiment que les débats avec des bons et des méchants et qui ne s'épanouissent que dans le manichéisme et les motions de censure, il existe un certain nombre de professionnels, et pas des...