Portrait Producteur

Volailler pour les étoilés

03.06.16

A peine vous a-t-il serré la main que déjà il se met à vous parler de ses petites bêtes à plume qu’il élève avec passion : canards, cailles, canettes, chapons, poulardes… Pour chacune d’elles, Pierre Duplantier détaille et précise, lui qui à 49 ans sait depuis toujours qu’en matière de volailles tous les modes de production et toutes les races ne se valent pas.

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Et c’est bien parce qu’il sait que ses poulardes ont quelque chose de plus que celles des autres éleveurs, qu’il s’en ouvre, il y a 15 ans, au chef Arnaud Daguin alors installé à Biarritz : au culot, il lui propose de lui faire goûter une de ses poulardes. Pas toujours bien connue du grand public, cette poule est engraissée de 20 à 21 semaines, d’abord nourrie comme un poulet de plein air, puis finie au lait dans l’obscurité. Brillat-Savarin que Duplantier cite volontiers, disait de cette volaille dodue et grasse qu’« elle est la reine des volailles et la volaille des rois ». Arnaud Daguin est alors séduit, recommande Duplantier aux grands chefs de son entourage et lui donne quelques conseils que le Béarnais n’a jamais oubliés : « Assurez la qualité, pas la quantité. Evitez de vouloir être partout ».

De la poularde aux cailles façon ortolans

Deux ans plus tard, on est en 2002, le nom de Duplantier commence à apparaître sur les cartes des grandes tables du Sud-ouest et de la capitale. Il décide de déposer sa marque. Ce sera en toute simplicité « Les poulardes de Pierre Duplantier ». Depuis, l’éleveur quatre étoiles s’est lancé dans le canard semi-sauvage, croisé Col vert et Khaki-campbell « un petit canard pour deux qui plaît beaucoup » ; et dans le Canard de Rouen qu’il livre à des tables prestigieuses comme celles de Pascal Barbot ou d’Alain Plassard « un canard assez gros qui est en train de sombrer dans l’oubli et c’est bien dommage.» Il fait aussi quelques canettes de Barbarie mais tempère : « pas beaucoup, tout le monde en fait.»

Pour se démarquer et « parce qu’on ne trouvait rien de valable », il se met en 2009 à faire des cailles façon ortolans, « c’est ronflant, je sais » s’esclaffe-t-il avant d’expliquer en quoi elles sont élevées à la manière des minuscules oiseaux qui font les délices des gastronomes : les cailles grandissent dans un lieu obscurci, ont un temps d’engraissement doublé « 4 à 5 semaines ce n’est pas assez », sont nourries avec du lait et disposent d’un traitement tout particulier à l’heure de leur dernier soupir : « on ne les saigne pas, on les étouffe puis on les plume à sec à la manière du gibier ». Comme le reste de ses volailles, les cailles ont tout de suite trouvé preneurs chez les grands chefs. « Ce n’est pas par snobisme que je suis allé vers les chefs cuisiniers, c’est parce que je n’avais pas de structures de vente pour le grand public, je ne me voyais pas aller vendre sur les marchés. Peut-être que d’autres ont du talent pour ça… Bien sûr, je vends aussi aux particuliers s’ils m’appellent et passent commande.»

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« Les volailles, c’est un peu comme une société humaine »

Depuis son exploitation qui domine les collines béarnaises, avec la découpe de la chaîne des Pyrénées pour horizon, auprès de sa compagne et de son fils de 3 ans, Pierre Duplantier est bien. Tellement bien qu’il est devenu maire du petit village de Méracq « je suis un peu tout, le conciliateur, le valet, celui qui s’occupe des gens.» Et d’enchaîner, goguenard « vous savez, les volailles, c’est un peu comme une société humaine ! » Du haut de sa colline, Pierre contemple ses volailles qui batifolent au grand air et mesure le chemin parcouru depuis qu’il a repris l’exploitation laitière de ses parents « de simples ouvriers agricoles ». « Le défi depuis des générations, c’est de savoir si on peut vivre ou pas du métier de paysan.

« Quand j’ai repris on faisait du poulet en Label Rouge pour la grande distribution mais ça ne m’allait pas. Il m’a fallu réorganiser la propriété, les modes de productions et trouver à vendre en circuits courts, je n’ai pas fanfaronné. Mais je n’ai pris la place de personne, j’ai simplement proposé un produit qui n’était pas encore sur les cartes. Il ne faut pas chercher midi à 14h, quand c’est bon c’est bon.» Et c’est d’autant plus bon qu’il livre aux chefs ses volailles effilées et éviscérées pour qu’ils puissent faire rassir la viande, parfois jusqu’à 15 jours : « les volailles, ça doit se laisser reposer, ça doit mâturer.» Maturée ou pas, il recommande de farcir sa poularde d’un crouton aillé et de romarin puis de la rôtir : « elle est faite pour ça. Elle a une peau qui tient le feu », et pourquoi pas de l’accompagner d’un tian de légumes ou d’une petite purée « sans trop de beurre ». Un régal, même s’il l’avoue dans un chuchotement, la mine gourmande et les yeux qui pétillent « moi, au restaurant, je prends plutôt du poisson ».

EARL Bergeras
 64410 Méracq
 Tel : 05 59 04 50 58

Un article produit dans le cadre de l’application Adresses Gourmandes.

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