Chronique La chronique de Camille

Un dîner vegan

05.06.18

Hier soir, on a mangé végan. Un peu par hasard, il y a quelques jours, je me suis retrouvée à faire mes courses dans deux magasins végétaliens. C’était la première fois que je mettais les pieds dans ces endroits. De prime abord, aucune différence avec les chaines bio classiques, car les protéines animales ne sautent pas aux yeux (au contraire, elles se planquent un peu partout, ces vermines).

Au Naturalia Vegan, quelques paniers de fruits et légumes trônent à l’entrée, histoire de faire frais, sauf que les fraises d’Espagne, au mois de mai quand il y en a qui poussent juste autour de nous, ça m’énerve. Et je ne vous parle même pas des pastèques et des tomates. Mais du végan bio, local et de saison, c’est certainement trop demander. De toutes façons, la plupart des végans s’en fichent : ce qui importe c’est de protéger les animaux, un point c’est tout. C’est une végane qui me l’a dit. Chez Un Monde Vegan, on ne s’embête d’ailleurs pas avec les végétaux frais : il n’y en a pas. Pour l’essentiel, ces magasins sont des enfilades d’emballages, petites boites et gros sachets agencés par dégradés de couleurs – beaucoup de plastique, de packaging et de marketing, et pas un seul dispensateur « vrac » en vue. Paquets de céréales par centaines, mais aussi fausses omelettes déshydratées, tubes de mayonnaise « egg-free », vins, cosmétiques, lessives, et même des croquettes pour chien – végan, donc.

On est au royaume des produits transformés, des substituts, des ersatz, des trompe-la-bouche bien emballés. Et c’est au rayon « frais » qu’on trouve les plus beaux spécimens de cette nouvelle industrie de la falsification alimentaire. J’ai nommé les reconstitutions de préparations lactées ou carnées – secteur qui excelle, soit dit en passant, en néologismes créatifs. Le rayon « faux-mages » déborde de « cheeze », « chease », « sheese », « veganella », « sojarella » ; un peu plus loin, c’est les pseudo-salamis et « végé-knaxxles » (?!?), « soja gulasch » (sous-titré « cubes hongrois »), le « joie gras » (aux noix de cajou), le sandwich « parisien » sans jambon ni fromage mais plein de carraghénane, xanthane, maltodextrine et huile de palme ;

 

les glaces choco-tofu, la pizza sans gluten, sans lactose et sans graisses animales (ne me demandez pas ce qu’elle contient), ou encore les bâtonnets de non-poisson pané, nommés « crispy sticks ». Les concepteurs de cette pépite ont jugé bon de mettre une tête de mort sur la boîte. Je crois que c’est censé faire référence à un pirate, pour appâter les enfants, mais j’ai préféré ne pas prendre de risques. Je suis repartie avec des mini-saucisses viennoises au tofu, des « Chickin nuggets » et une « spécialité au cumin à tartiner ».

De retour à la maison, j’ai « cuisiné ». J’ai servi la tartinade avec des radis pour l’apéro. J’ai mis les « saucisses » dans l’eau chaude et j’ai fait frire les « nuggets » dans l’huile d’olive. J’ai aussi faire revenir des pommes de terre, des petits pois, des pois gourmands, les fanes fraîches des radis, de l’ail vert, une courgette – soit tous les légumes (bio, locaux et de saison) achetés quelques jours auparavant dans mon épicerie de quartier, Le Zingam, qui se fournit directement auprès de paysans qui aiment ce qu’ils font. Mes enfants comme mon mari ont écarté les préparations industrielles en faisant des têtes contrites, et ont dévoré la fricassée de légumes. Le reste a fini à la poubelle.

Hier soir, on a mangé végan. Et ce n’était pas avec des produits de substitution.

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