S’agissant de thé et en ces temps de Brexit, je me suis dit qu’il fallait que l’on rende hommage à nos amis britanniques et j’introduirais mon propos par cette citation d’Henry James dans « Portrait de femme » : « Peu d’heures dans la vie sont plus agréables que l’heure consacrée à la cérémonie connue sous le nom de thé de l’après-midi. »
Et oui, malgré la vie moderne trépidante de la City et de ses Starbucks au kilomètre, l’Afternnoon tea reste une tradition encore bien présente outre-manche. Tradition d’ailleurs extrêmement récente vous dirait un historien de sa Majesté puisque c’est seulement en 1840 que Anna Russell, Duchesse de Bedford, se trouva régulièrement fort affamée quand 5 heures fut venu. Elle décida donc de commander à son Majordome de veiller à assortir son thé d’un peu de pain de mie et de beurre sous forme de sandwichs de la taille d’un doigt. Ses nobles amis trouvèrent la chose « so chic » qu’ils décidèrent d’en toucher un mot à la Reine Victoria vite convaincue qu’il était temps d’innover côté coutumes, afin notamment de renforcer ses réseaux sociaux grâce à de l’événementiel convivial. Bref, au lieu d’un vulgaire goûter à la française, porte ouverte à tous les Nutellas du monde, la Couronne a codifié l’Afternoon Tea et rien n’a vraiment changé, à l’exception d’une amélioration considérable de ce repas, avec l’arrivée sur les trois plateaux règlementaires, des scones. Parce que Anna et Victoria, le pain de mie, ça les a vite ennuyé et qu’elles se sont opportunément rappelé que les écossais avaient, eux, des traditions dignes d’une lignée royale, avec ce biscuit sec dont on trouve des traces dès les années 1500. Il faut dire que le truc ne nécessite rien de fou côté produits : de la farine d’avoine, du lait, du beurre et, à l’époque, du lard. Pour dire, à l’origine, on les nommait « Scottish quick bread » soit « Pain écossais vite fait ». La forme était ronde et plate et permettait de découper des petites parts en triangle pour le service. Autant dire ça ne valait pas un bon petit beurre ! Et puis, l’arrivée de la levure a fait son effet, et le scone est devenu rond et gonflé.
Mais, ça semble quand même un biscuit assez sec, ils sont généralement accompagnés comment ?
Aïe aïe aïe, là Caroline vous ne savez pas dans quel débat national vous mettez les pieds ! Certes les britanniques s’entendent sur la nature de l’accompagnement : une couche de Clotted Cream, soit une crème caillée obtenue par chauffage pendant huit heures au four à basse température, à laquelle on ajoute une couche de confiture. Mais le débat fait rage quand il s’agit de savoir quelle Clotted Cream ? Car il en existe deux en guerre gastronomique permanente depuis le XIVème siècle au Sud-Ouest de l’Angleterre. Celle du Devon et celle des Cornouailles. La première a visiblement, d’après les historiens, un droit d’ainesse et il n’est d’ailleurs pas rare au Royaume-Uni de nommer la Clotted Cream : Devon cream. Mais la deuxième a gagné en 1998 une grande bataille en obtenant, ironie de l’histoire, de l’Union européenne, l’appellation d’origine protégée.
Une adresse pour un Afternoon Tea dans les règles royales ?
Et bien Caroline, je dirais qu’une valeur sûre reste Fortnum & Mason, une jeune épicerie londonienne fondée en 1707 à une encablure de Picadilly Cicus. Et puis pour les scones, on va mettre la recette de Buckingham Palace en ligne !
BUCKINGHAM PALACE SCONES
– 3 tasses et demi de farine
– Une pincée de sel
– ¾ de tasse de beurre
– Un sachet de levure
– ½ tasse de sucre
– 1 œuf
– ½ tasse de lait
– des raisins secs
Mélanger énergiquement le beurre, la farine le sel et la levure.
Ajouter le sucre et les raisins.
Ajouter l’œuf et un peu de lait.
Mélangez le tout jusqu’à obtention d’une pâte pas trop sèche.
Composez des boules de ½ inch d’épaisseur (1,26cm !)
Mettez les au four à 350° Fahrenheit (180° Celsius !) en les ayant badigeonnées préalablement d’un œuf battu.
Cuisson entre 10 et 15 minutes.
Impérativement servir chaud.
Les Bonnes Choses du 17/02/2019 – Tea time
Invités
Etes-vous plutôt de ceux qui considèrent le thé comme de l’eau chaude avec un vague goût de foin ou des grands amateurs qui le boivent comme du vin sans alcool? De l’histoire de la feuille de thé à sa couleur, du goût du thé à la cérémonie du thé, et de la dégustation pure à la cuisine, on fait le tour de Camellia Sinensis en compagnie d’une sommelière et d’un archéologue du thé.
Avec
Lydia Gautier, experte en thé.
Arnaud Bachelin, archéobotaniste et spécialiste du thé
Anne-Sophie Pic, chef cuisinier et maître restaurateur propriétaire du restaurant gastronomique « la Maison Pic » à Valence
Chroniques
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