Aujourd’hui, n’écoutant que mon penchant pour l’actualité la plus chaude et ma sensibilité au bien-être animal, je me suis d’abord intéressé aux meurtres prémédités de près de trois millions de sympathiques gallinacés qui vont tous finir définitivement leur existence le 24 décembre, vers minuit, sans pour autant avoir manifesté le moindre attachement à la chrétienté. Mais pourquoi donc la dinde fait-elle ainsi massivement les frais de nos agapes de Noël, elle qui n’avait rien demandé du temps où elle vivait peinarde dans les pampas du Mexique ?
Et oui, parce que ceux qui croiraient encore à une tradition bien ancrée de l’identité culinaire française vont en être pour leurs frais. Car figurez vous que la dinde aurait très bien pu s’appeler la damérique si le GPS de Christophe Colomb ne s’était pas emmêlé les sextants. Sa bande d’aventuriers se croyant en Inde ramena en effet d’Amérique du sud en 1548 un coq d’Inde, lequel devint un poulet d’Inde, qui subit alors une double transformation en accostant en Espagne, en changeant de sexe, et en comprimant son appellation en : dinde tout court.
La première fois qu’une dinde est apparue sur une table en France serait, selon plusieurs historiens, plus de vingt ans plus tard, à l’occasion des noces du roi Charles IX avec Elisabeth d’Autriche, qui par ailleurs était loin d’en être une. Mais il a fallu attendre le XVIIIe siècle pour que la dinde, animal encore rare et donc exotique, soit réservé à la célébration de fêtes importantes. Plus tard, on comprit surtout qu’elle présentait aussi l’avantage d’être plus grosse que le poulet et moins chère que l’oie, bref, un animal prêt pour le marketing, facilement fabricable en mode intensif, pour satisfaire les consommateurs des trente glorieuses en manque de signes extérieurs de richesse.
Bon, on a bien compris pourquoi la dinde est devenue un plat incontournable de Noël, mais elle est désormais sérieusement concurrencée par le chapon, non ?
Effectivement Caroline, depuis quelques années, voilà que les assassinats massifs de volailles de noël se portent sur cet animal d’origine casse-couilles, infoutu capable avec sa voie de fausset de réveiller la moindre basse-cour et qui a su dès l’origine compenser son handicap en développant une masse musculaire dont la dinde est fort dépourvue.
Non content de se la ramener côté pectoraux, il se la joue aussi côté ancrage historique puisqu’on trouve du chapon dans la Rome antique.
Mais à vrai dire il y a des différences beaucoup plus importantes que le goût, essentiellement dues au fait que l’on ne produit du chapon que pour Noël, donc, peu. La réglementation de sa commercialisation est par ailleurs beaucoup plus encadrée. Le chapon doit en effet être bagué et porter un sceau d’identification avec la mention « Chapon». Vous devez également vérifier qu’il a les pattes bleues, la peau très lisse et qu’il a été nourri avec au moins 75 % de céréales. Et contrairement à la dinde, le chapon doit grossir lentement, tranquillement, en se faisant les muscles en gambadant, loisir inconnu de la dinde qui pour plus de 95% du cheptel est élevée en batteries.
Le danger, évidemment, c’est que pour toutes ces raisons la consommation de chapon augmente encore et encore et qu’il soit, à terme, le dindon de la farce.
Les Bonnes Choses du 23/12/2018 – Christelle Brua : « Ce titre de meilleure pâtissière au monde est un titre collectif. »
Invitée
Christelle Brua, cheffe pâtissière du restaurant triplement étoilé Le Pré Catelan à Paris et la première femme à avoir été élue meilleure pâtissière au monde (en octobre 2018) grâce à sa fameuse recette de la « Pomme en sucre soufflé ».
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La madeleine de … Rachida Brakni : » le croquant du glaçage, le moelleux de la crème, toutes les étapes sont importantes »
La Cerise sur le gâteau de Pierre Hivernat : La dinde ou le Chapon, telle est la question.
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