Ville campagne Série U.S.A. #4

Entrepôt high-tech pour livrer au plus vite du frais à New-York

28.11.19

Quatrième épisode de nos reportages aux États-Unis, à New York, l’entreprise FreshDirect promet de livrer en quelques heures les fruits, poissons et bouteilles d’eau commandés sur internet et compte sur son entrepôt high-tech installé dans le Bronx pour tenir les délais.

C’est la période de pointe à l’approche de la fête de Thanksgiving, quand les familles américaines se retrouvent autour d’une grande table. Tout semble réglé comme une horloge suisse, le système informatique y veille. Au sol, des salariés manient des palettes, scannent des étiquettes, trient des produits. Mais en l’air, les grandes boîtes en plastique aux couleurs orange ou vertes de la marque semblent mener leur propre vie, avançant rapidement dans un dédale de tapis roulants, de spirales emmenant les colis aux étages supérieurs, au milieu d’étagères aux innombrables rayons. Dès qu’un internaute commence ses achats sur le site de FreshDirect, il est repéré. « On sait quelles quantités il commande habituellement, quel camion pourrait être utilisé, et en fonction, on lui propose une plage horaire de livraison« , explique Timothy Knoll, le directeur des opérations. Les commandes sont regroupées par destination et les boîtes peuvent alors se mettre en branle.

15 kilomètres de tapis

Les tapis roulants courent sur près de 15 kilomètres dans l’entrepôt de 37.000 mètres carrés. Mais tout a été conçu pour limiter les trajets, qui durent entre 25 et 30 minutes en moyenne. Au rayon des petits produits, des robots vont chercher un à un les articles désirés dans d’immenses étagères et les amènent au moment souhaité à six stations où des employés les scannent, les emballent au besoin, et les déposent dans une boîte prestement renvoyée sur son parcours d’un coup de gros bouton rouge. Les bouteilles d’eau, les articles les plus demandés, sont entreposées près du tapis. Aux fruits et légumes, des employés voient arriver sur une tablette les produits à sélectionner, et mettent de côté ceux qui sont abîmés. Dans une salle réfrigérée, d’autres salariés découpent les poissons du jour, encore souples dans leurs cartons de glace.

« Environ 90% de nos produits frais viennent directement des producteurs« , explique Scott Crawford, directeur de la mise en marché. Cela permet d’éviter les intermédiaires et de gagner du temps. « Si vous commandez une livre de cabillaud sept jours à l’avance, le poisson nage encore dans l’océan pendant quatre à cinq jours avant d’arriver ici« , remarque Timothy Knoll. Pour prévoir au plus juste l’approvisionnement et éviter le gaspillage, « nous faisons confiance à nos fournisseurs et nous savons gérer au mieux nos stocks« , affirme le responsable. Chaque produit dispose d’un code-barres recensant sa nature, son emplacement, et sa date de péremption. FreshDirect se repose aussi sur les vingt années de données accumulées depuis son lancement en 1999. L’entreprise sait anticiper finement les habitudes des consommateurs tout comme les conditions de circulation, y compris en fonction de la météo.

« Le pire ennemi d’un épicier en ligne n’est pas Amazon, c’est lui-même »

Le groupe n’est plus aussi hégémonique qu’il a pu l’être à New York mais domine encore: il possède 68% du marché des livraisons de produits frais dans la ville, largement devant Instacart (13%), Peapod (9%) et Amazon Fresh(9%), selon le cabinet d’analyse Earnest Research. Ses ventes ont connu un coup de mou juste après le démarrage de l’entrepôt du Bronx à l’été 2018. Le temps que la machine se rode, des clients se sont plaints de commandes incomplètes ou en retard. FreshDirect a depuis repris un peu de terrain.

Le commerce en ligne de produits frais « continue de croître et notre fonctionnement n’a jamais été aussi bon« , fait valoir l’entreprise qui offre depuis mars la livraison pour le jour même. « Le pire ennemi d’un épicier en ligne n’est pas Amazon, c’est lui-même« , remarque Paula Rosenblum, spécialiste des technologies pour la distribution chez RSR Research. « Il y a clairement un marché mais la question est de savoir s’il peut être rentable« , affirme-t-elle en soulignant que les marges sur les produits alimentaires sont généralement assez faibles.

FreshDirect ne dévoile pas ses chiffres, indiquant seulement gérer « des milliers » de commandes par jour. L’entreprise a en tout cas déjà vu défiler plusieurs cycles économiques – la taille moyenne des dindes commandées pour Thanksgiving varie en fonction de la croissance -, et diverses modes alimentaires. « Il y a 15 ans, on voyait sans doute plus de fruits et légumes congelés, maintenant les gens veulent du brocoli et des choux de Bruxelles frais« , constate Scott Crawford. « Si vous ne les livrez pas correctement à New York« , ville au fort caractère, « alors vous ne durerez pas longtemps. »
Par Juliette Michel pour AFP

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