De Berlin, j’avais reçu des avis mitigés. Avais-je été mal conseillée ? Peu importe, dans l’expérience du voyage, c’est toujours la possibilité de se forger ses propres convictions qui m’anime. Quoi de mieux qu’arpenter ses rues, sans rien chercher, pour se laisser happer par l’ambiance et attirer par son flair ? Voici quelques adresses que vous aurez sans doute (peut-être) envie de tester.

ITA Bistrot
Repéré à Marseille chez Jogging où les chefs avaient été invités en résidence en septembre dernier, c’est le seul établissement que j’avais pris soin de réserver. Ici, dans une ambiance de bistrot intime et vivante, au cœur du très bohême (et cossu) Prenzlauer Berg, un jeune couple-duo, Micaela Longo et Javier Barbosa, originaires d’Amérique du Sud (Argentine pour elle, Colombie pour lui), proposent une cuisine sans étiquette mais pleine de convictions : Wood fire bistro, seasonal food & naked wines* comme à propos. L’espace, dont le four à bois est la pièce maîtresse, s’anime d’une clientèle cosmopolite et des allées et venues d’une équipe aussi jeune qu’énergique. Dans l’assiette, on est séduit par la justesse des goûts et des cuissons, et l’esthétisme aux notes colorées. S’il ne fallait qu’un mot pour caractériser l’identité de la cuisine, ce serait le twist. Celui qui réveille les papilles, vous transporte et décuple le plaisir de l’instant.

Ici, il s’appelle Huacatay (tagète des décombres), herbe aromatique péruvienne caractéristique de la cuisine andine comme dans ce tataki de sandre, lait de panthère et concombre ou Morita, un piment au fumé intense, classique de la cuisine mexicaine qui magnifie le steak de flanc grillé (à la cuisson parfaite) et sauce tomatillo. Les quilles bien choisies, nombreuses et majoritairement natures, n’aident pas à quitter ce lieux qui fait vivre la chaleur. Pour nous, ce sera un délicat spätburgunder du jeune Lukas Hammelman. Basé à Zeiskam, un petit village situé à l’est du Palatinat Rhénan dont on dit qu’il est « seulement bon à faire pousser des patates » . ITA, table berlinoise, résolument underground.
Plus d’informations ICI et le compte Instagram, c’est LÀ
Boxhagener Platz
Sur cette place, Boxi, au cœur de Friedrichshain, dans l’ancien Berlin-Est, un marché de producteurs regroupe chaque samedi habitués et bados bobos. Pendant que les enfants profitent de l’aire de jeux, les parents peaufinent leurs emplettes dans des concept-stores branchés et autres boutiques de créateurs. Sur le Wochenmarkt, entre étals Flower Power et coffee-shop à roulettes, j’ai jeté mon dévolu sur un stand de Lahmacun.

Cette pizza turque, grande concurrente du Kebab en matière de street-food, est vieille comme l’antiquité. À la pâte très fine, elle se déguste dans sa forme traditionnelle composée de viande hachée, tomates, persil, oignons, poivrons et épices. J’ai englouti la mienne (aux épinards et son supplément salade) depuis un banc jouxtant le parc, à observer les locaux se prélasser sur l’herbe malgré la fraîcheur automnale. Le lahmacun me rappelant, s’il le fallait, que Berlin, c’est aussi cette ville cosmopolite animée par un esprit de quartier où l’on fait société. Là, bat son « centre », à défaut d’être historique.
Die Backpfeife
C’est la queue devant cette boulangerie miniature qui a attiré mon attention à l’entrée de Holzmarkt. Ancienne friche située sur les rives de la Spree, ce lieu résolument hybride façon village d’artistes alternatif abrite sur près de 12.000 mètres carrés hangars, cabanes, artisans, boutiques de déco et restaurants. Idéal pour faire une pause dans le tumulte urbain de Berlin, c’est ici que le jeune Mattis Harpering a ouvert son fournil bio, dans une cabane en bois brut.

Résolument engagé, l’artisan boulanger du village propose notamment une sélection de pains aux variétés anciennes (seigle, petit épeautre, etc.) en fermentation lente. C’est sur son généreux ZimtÄpfeln Schnecken* aux morceaux de pommes compotés et à la pâte aussi ample que réconfortante que mon œil s’est arrêté. Dégusté sur un transat au bord de la rivière où tout Berlin semblait s’être donné rendez-vous pour profiter des derniers (rares) rayons du soleil, le petit-déjeuner aurait pu se prolonger en goûter. Avec die Backpeife, on se convainc (s’il le fallait) qu’à Berlin les utopies existent.
Peter Shlemihl
Choisir le resto du dernier soir (surtout quand c’est un dimanche pluvieux et que le vol retour est prévu à 6 h le lendemain) n’est pas une tâche aisée. L’estomac ayant toujours merveilleusement guidé mes pas, je finis par dénicher… ce que j’espérais. En plein Kreuzberg où je loge, quartier historiquement punk et multiculturel, Peter Shlemihl c’est le réconfort d’une auberge allemande traditionnelle, sans le suranné et allégée en roboratif.

La lumière délicatement tamisée, bougies obligent, participe au charme d’une ambiance où l’on vient dîner, avec les poussettes, en famille ou entre amis, pour éviter le spleen du dimanche soir. Le fait-maison se déguste en toute humilité. L’occasion de goûter au Spinatknödel, une spécialité incontournable au Tyrol, les boulettes aux épinards servies généreusement (au sens propre comme au figuré) accompagnées de beurre et saupoudrées de parmesan avec un verre de Pinot Gris (Grauer Burgunder). Et si je vous disais que c’était délicat ? Berlin, c’est aussi cette ville entre passé, présent et futur, résolument moderne.
Plus d’informations ICI
Et deux autres (bonnes) adresses pour la route…
Bolinas
Charmant mélange (réussi) entre le ‘Californian way of life’ et la culture traditionnelle des cafés berlinois, l’endroit est aussi une boutique qui propose de la décoration minutieusement choisie.
Hoeschen Bar
Pour un Under the Stairs (Mezcal, Gingembre, Poire, Citron Vert) avant ou après ITA
Partagez moi !
Vous pourriez aussi être intéressé par
Hospitalité Laits végétaux
Le lait d’avoine bien parti pour devenir le roi des laits végétaux
Hospitalité À lire
La renaissance des auberges par Victor Coutard et Anne-Claire Héraud
Hospitalité Carnet de route