On est allé à Dunkerque, pour voir. Après avoir fait un tour dans le port, le centre-ville et la plage, on a retrouvé nos premiers hôtes couchsurfing. Capucine et Pauline sont arrivées tout sourire, on était aussi les premiers pour elles car les demandes n’affluent pas à Dunkerque ! Sympas, dynamiques et joyeuses, elles nous ont emmené chez elles, à Saint Pol sur Mer, juste à côté de Dunkerque. Pauline a fait des « knepfle », sortes de pâtes alsaciennes, et elles nous ont parlé d’un endroit où elles allaient de temps à autre cueillir leurs fruits et légumes pas loin à Hoymille, du côté de Bergues, là où a été tourné le fameux « Bienvenue chez les ch’ti ».
Nous sommes entrés dans la boutique de la ferme « La cueillette de Hoymille », accueillis par Matthieu qui, avec ses frères, est à l’origine du projet. Il est agriculteur, né ici et nous déclare être « indélocalisable ». Son père avait une ferme dans le coin et avant lui son grand-père. Matthieu a fait une formation pour devenir agriculteur et lors de sa formation, il a fait un stage dans un endroit où l’on pratiquait la libre cueillette. Il avait bien aimé l’idée. Lui et ses frères étaient dans l’agriculture traditionnelle, ils faisaient surtout dans le pissenlit blanc. Ça ne marchait pas trop mal et un jour ils ont décidé de lancer la libre cueillette sur les fraises. La première cueillette a eu lieu en juin 2006. Comme ça a bien marché, en 2009 ils ont étendu la cueillette à différents légumes, même si c’est un peu plus compliqué. Ils ont rejoint un Groupement d’Intérêt Economique, le réseau national Chapeau de Paille. Ainsi Matthieu et ses frères disposent d’une aide technique pour la réalisation de leur projet. Ils proposent maintenant une cinquantaine de fruits et légumes sur dix hectares, suivant les saisons, sept jours sur sept, du 1er Mai à la Toussaint. A la demande des clients, ils tentent d’élargir leur gamme au maximum et sont en moyenne 8 à bosser toute l’année sur le site.
Matthieu et son équipe sont en charge de planter les légumes et de les entretenir. Les légumes ne sont pas bio, car selon lui l’appellation « Bio » pose un certain nombre de problèmes, mais ils n’en sont pas loins. Matthieu définit la structure plutôt comme de l’agriculture raisonnée : « Utiliser le moins possible de produits, seulement en cas de maladies sur les plantes. Au sol sont posées des bâches noires biodégradables qui empêchent les mauvaises herbes de pousser. » Le principe pour les clients est assez simple : ramasser et cueillir. A l’entrée on trouve des brouettes. On en prend une et on se balade entre les champs de légumes, les serres et le verger pour ramasser ce que l’on veut. De grands panneaux, devant chaque culture, donnent le nom du produit, le prix, la technique pour le cueillir et parfois quelques trucs et astuces. Ainsi devant les radis est écrit « Cueillez les en les tirant par les feuilles. Délicieux nature ou en soupe de feuilles. ». Pour les fraises, « c’est le moment idéal pour les confitures ». Parfois certains plants ne sont pas encore accessibles aux cueilleurs. Soit il est trop tôt, soit les plantes sont en traitement et dans ce cas des panneaux indiquent « NE PAS CUEILLIR. Tout vient à point à qui sait attendre. » Pour se repérer entre les champs, de grandes bâches avec le nom des produits sont tendues par-ci, par-là. En ce mois de juillet à la libre cueillette de Hoymille on a le choix entre Pommes, Fraises, Tomates, Patates, Courgettes, Oignons, Haricots verts, Haricots beurre, Radis, Epinards, Salades, Céleris, Carottes… et beaucoup d’autres ! Une fois que la brouette est chargée, on retourne à l’entrée de la plantation, dans le magasin où tout passe en caisse. « C’est assez sympa pour eux de pouvoir avoir une alternative aux grandes surfaces où on ne sait pas d’où viennent les produits » nous dit Matthieu. Et d’ailleurs entre les tomates de la cueillette et les tomates de supermarché, il y a quand même une sacrée différence. On a testé pour vous!
Pour Matthieu, c’est une entreprise. Ils se sont lourdement endettés pour pouvoir réaliser ce projet, les charges sont élevées et il faut payer les salaires mais pour lui ça reste une solution viable pour exercer son métier d’agriculteur autrement. Très dépendants de la météo (forcément, s’il pleut personne ne vient cueillir), ils ont fait le choix de ne vendre qu’aux particuliers. Comparé à ses collègues agriculteurs qui bossent plus traditionnellement, il dit travailler beaucoup plus, de 07h30 à 20h30 7j/7 ! Mais il se dit aussi plus épanoui. Il aime le contact direct avec les clients et les gens sont ravis, beaucoup l’encouragent et le félicitent. En juin dernier, Matthieu nous explique qu’ils ont célébré la « fête de la brouette » sur la plantation car « La brouette, c’est le symbole du jardinier ». L’équipe a donc réalisé une journée d’animations gratuite pour les clients avec une course de brouettes parents-enfants, un concours de la plus belle brouette et un permis brouette pour les tous petits. Grand succès, bons moments, ces petits riens changent un peu le quotidien.
Matthieu avait du pain sur la planche, de la ficelle sur des piquets en l’occurrence. Il nous a laissé visiter le site et nous a serré la pince. Nous on est resté là, à travers les plantations et divers légumes. A l’entrée de la cueillette s’élevait un panneau : « Locavore : Soyez locavore ! Cueillez dans le respect des saisons les fruits et légumes de votre région. Agriculture durable. » Autour de nous, beaucoup de familles. Devant moi, un groupe de trois, quatre personnes entrent dans une serre pour cueillir des tomates. Elles laissent la brouette devant la serre et discutent du moment où les tomates sont mûres et de la meilleure date pour les cueillir. Au milieu des rangées de framboises et de fraises, les insectes bourdonnent, le soleil chauffe. En passant, je décide de goûter aux fraises. Watchaaa ! Attention les papilles ! La fraise envoyait de la patate chaude ! C’était trop bon. Un père et son fils sont penchés sur les haricots, un sac à la main. J’ai continué ma balade et suis allé sentir les pommes dans le verger et à côté. L’endroit est grand, en plein soleil. Je traverse. Une mère et trois enfants, armés d’une brouette, lisent la pancarte des concombres avant d’en cueillir. L’un d’eux pas très attentif préfère jouer entre les plants et quand sa mère lui demande de prendre un sac pour ramasser les concombres il s’écrie « C’est des concombres ??? ». En repassant à l’entrée, on trouve les fleurs et les aromates. Et dans le magasin, il y a à peu près tout ce qu’on veut : vin, confiture, épice, pâté, œufs, fromage, yaourt, viande, saucisson et chocolat ! Si on n’a pas le temps de cueillir soi-même ses légumes, certains y sont proposés.
En partant, Matthieu nous a expliqué encore que les produits du magasin provenaient tous de 15km à la ronde et que c’était la première ferme à la sortie de Dunkerque. Moi, je voulais un chapeau de paille. On peut pas s’appeler «Chapeau de paille » et ne pas avoir de chapeau. Je lui ai donc demandé et il m’a filé un chapeau. J’étais très content de mon chapeau 100% paille et on a pris la route direction Bergues. On a marché sans se presser jusqu’à Bergues. Sous le soleil, au milieu des cui-cui, avec quelques voitures. C’est pas compliqué, c’était tout droit. On est arrivé devant les remparts de la vieille ville. A l’intérieur, c’était très mignon : un petit canal fleuri, de petites maisons types colombage. On s’est promené, avant de retrouver nos deux muséologues. Le beffroi était comme dans le film et à côté d’une terrasse était inscrit un « la fameuse cascade dans le film Bienvenue chez les ch’ti a été tournée ici ! ». On a retrouvé Capucine et Pauline avec ses petits yeux et ses cheveux presque bouclés et on est allé manger à l’auberge Le Bruegel, qui avait force récompenses diverses. Une grande salle ambiance auberge du XVIIIème, un feu au fond et des ustensiles sur les murs, les serveuses habillées comme si elles allaient prendre la Bastille dans les cinq minutes et la bouffe pas mal du tout ! Ça sentait le Maroilles à plein nez là-d’dans ! J’ai pris un Welsh parce qu’il était hors de question de partir du Nord sans y avoir goûté.
La Cueillette de Hoymille
Ferme du réseau Chapeau de paille
Route départementale 4
Pont de Benkies Mille
59492 Hoymille
Et pour tous ceux qui ne savent plus très bien où sont les villes que découvrent nos deux compères, voici une carte pour mieux se repérer.
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