Culture food Cinéma
Des réfugiés à la table d’un Pub de l’Angleterre profonde
En salle depuis mercredi, The Old Oak (Le vieux chêne) aborde le sujet de l’immigration et de son acceptation au sein d’une communauté locale. Ce nouvel opus hyper réaliste de Ken Loach est gonflé d’humanité.
Dans la veine de ses précédents films francs et véristes, Ken Loach met en scène le quotidien de réfugiés politiques débarqués dans une communauté locale déjà vidée par la crise. L’histoire commence fort. Un car transportant plusieurs familles syriennes marque l’arrêt dans un petit village du nord-est de l’Angleterre, où vie privée et vie publique semblent se confondre. Dès la première scène, le réalisateur nous met dans le bain avec des dialogues aiguisés comme des couteaux, transpirant le rejet profond de ces familles ayant fui leur pays en guerre. Au milieu de ces sentiments de haine et de peur, TJ Ballantyne (Dave Turner) – propriétaire du pub The Old Oak, et Yara (Ebla Mari) – jeune photographe syrienne, se lient d’amitié.
À l’instar de Moi, Daniel Blake (2016), le réalisateur britannique met en lumière la difficulté d’accès à l’alimentation en tant que problématique majeure, capable tout à la fois de réunir et d’isoler. Partant du dicton de sa mère “Si on mange ensemble on se serre les coudes”, TJ, avec l’aide de Yara et de Laura (une bénévole), décident d’aménager l’arrière-salle du pub pour en faire un lieu d’accueil ouvert à toutes et tous. Si les familles syriennes fraîchement arrivées tentent de trouver leurs marques au milieu du quotidien des locaux, ces derniers tentent d’exister malgré la précarité économique, parfois même l’isolement social, auxquels ils font face. L’arrière-salle du Old Oak, transformée en lieu d’hospitalité, devient alors le moyen de pallier les détresses matérielles et humaines de chacun, au-delà des origines. Partager un repas ensemble au fond de ce café d’habitués, c’est engager un mouvement de solidarité entre deux communautés, aux différences culturelles évidentes mais aux besoins similaires d’humanité.
La force du film réside dans sa capacité à traiter la question migratoire et celle de la xénophobie avec recul et prise de position. Tous les personnages ont leur place dans le village comme dans le film. Le récit est touchant, les dialogues sont tranchants, teintés de cet accent caractéristique du nord de l’Angleterre, et capturés à la manière d’un documentaire.
Ouverture de paquets de kleenex, symphonie nasale et autres bruits gracieux résonnent dans la salle, témoins d’une profonde émotion, notamment suscitée par la dernière scène, tout simplement bouleversante.
The Old Oak, film anglais de Ken Loach. Avec Dave Turner, Ebla Mari, Claire Rodgerson (1h53).
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