Aujourd’hui, alors que le Président Macron a annoncé jeudi les mesures qu’il compte mettre en œuvre dans le plan pauvreté, je voulais poser la question : « Manger coûte-t-il trop cher ? ».
Alors même que pendant les trente glorieuses, poussées à 50 s’agissant de l’agroalimentaire, on nous a promis monts et merveilles en termes de sécurité alimentaires et d’accès à tout, par tous, il semble que le bio ou le concept de manger sain et durable en circuit court échappent à certains. Des ingrats qui ne reconnaissent pas les efforts faits par les producteurs et l’industrie ? Non, plus simplement des pauvres qui sont à la fois le produit et la source d’un système qui se mord la queue.
Je m’explique. Commençons par nous balader dans les rayons d’une grande surface dans laquelle faut-il le rappeler plus de 70% des français continuent à faire leurs achats alimentaires. On y voit encore et toujours toutes les astuces de communication les plus basiques pour faire comprendre au client que moins cher que moins cher que chez le voisin déjà moins cher, t’as de la chance, c’est ici ! On finirait par penser que la grande distribution ne travaille qu’à notre bonheur économique si l’on ne se doutait pas que les ingénieurs en marketing avaient compris depuis longtemps qu’un pauvre, plus un pauvre, plus un pauvre, ça constitue un marché.
Vraiment ? Malheureusement quelques chiffres parlent d’eux-mêmes. Les Restos du cœur créés par Coluche en 1985 célébraient en 2014 le triste record du passage au million de bénéficiaires. Mais malheureusement, au cours de leur campagne 2016-2017, Ils ont distribué des repas à près de 1,3 millions de personnes, soit 30% d’augmentation en trois ans. Dans son douzième baromètre annuel Ipsos sur la perception de la pauvreté, le Secours Populaire a révélé mardi qu’un peu plus d’un cinquième des Français avaient du mal à se nourrir quotidiennement. Les foyers les plus modestes, dont de nombreuses mères seules, étant évidemment les plus touchés. Ainsi, près d’un Français sur deux dont les revenus mensuels sont inférieurs à 1.200 euros estime ne pas être en mesure de s’offrir une alimentation variée et de faire trois repas par jours.
Quant à la proposition du plan pauvreté présenté jeudi et garantissant un petit déjeuner à chaque écolier, elle sonne comme un cruel aveux d’échec du plan pauvreté précédent du Président Hollande.
Les français ont donc fait fondre la part de l’alimentation qui dépassait les 30% de leur budget dans les années 60 pour arriver à moins de 15 aujourd’hui. Et le cercle vicieux s’est mis en marche sans que l’on sache aujourd’hui très bien comment l’arrêter. Car une nourriture qui ne vaut pas grand chose a fini par faire croire aux consommateurs qu’elle n’avait pas de valeur. Pour produire un steak à guère plus d’un euro ou un poulet à 5€, les industriels ont dû tout compresser, y compris de la viande de cheval dans des lasagnes, enlevant au passage le goût des choses et le remplaçant par un goût préfabriqué conçu pour éduquer le mangeur à leurs besoins commerciaux. Ils ont alors dû également réduire les marges des agriculteurs, eux-mêmes obligés de produire toujours plus et moins cher pour compenser leurs baisses de revenus.
Ainsi va ce cycle stupide et indigne de la septième puissance économique mondiale qui, in fine, amène les plus pauvres d’entre les français, dont le nombre est évalué par l’INSEE entre 8 et 10 millions, à considérer la mauvaise nourriture pas chère, non plus comme une nécessité, mais comme une variable d’ajustement.
Les Bonnes Choses du 16/09/2018 – Sans viande, vraiment ?
Une étude du Credoc (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie) parue la semaine dernière fait état d’une baisse de 12% de la consommation de viande en France en dix ans. Est-ce une bonne nouvelle ? Allons-nous vers une société sans alimentation carnée ?
Une enquête du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc) parue la semaine dernière, fait état d’une baisse de 12% de la consommation de viande en France en dix ans. On serait passé entre 2007 et 2016 de 153 à 135 grammes par jour et par personne. Le mouvement n’est pas nouveau, mais il vient confirmer une tendance de fond qui devient un phénomène de société : le véganisme. Pas une semaine sans tribune, essai, initiative ou festival pour esquisser les traits d’un monde qui bannirait toute exploitation animale et ce, malgré les efforts de la filière pour vendre la qualité de ses produits et montrer son engagement pour l’environnement, comme cette semaine à Rennes, aux Assises de l’élevage et de l’alimentation. Et les tensions se font parfois vives entre défenseurs de la cause animale et bouchers, comme en témoignent la demande d’annulation d’un festival végan à Calais cet été (qui a finalement eu lieu samedi dernier) et le vandalisme de boucheries récemment. Pouvons-nous/voulons-nous nous passer de viande, vraiment ? Comment sortir de la guerre culturelle autour de la viande ? Le végétarisme est-il l’avenir de l’homme ? Une troisième voie entre le tout animal et le tout végétal est-elle envisageable ?
« Vices et vertus du végétarisme », c’est notre plat du jour!
Invités
Florence Burgat, philosophe,directeur de recherche 2 à l’INRA-SAE2 et co-rédactrice en chef de la Revue Semestrielle de Droit Animalier (publication de l’université de Limoges et de l’université de Montpellier)
Daniel Tomé, directeur de l’unité physiologie de la nutrition et comportement alimentaire (Inra).
Chroniques:
La madeleine de … Joann Sfar « Le couscous de ma grand-mère, c’est mieux que tout »
Et La Cerise sur le Gâteau, la chronique de Pierre Hivernat « Manger coûte-t-il trop cher? » .
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