« Manger, ça revient cher, trop cher » : la pauvreté alimentaire s’enracine en France selon le Secours populaire, qui appelle à « entrer en résistance » contre ce fléau avant la présentation du « plan pauvreté » du gouvernement.
Dans son douzième baromètre annuel Ipsos sur la perception de la pauvreté, l’association révèle mardi qu’un peu plus d’un cinquième des Français ont du mal à se nourrir quotidiennement. Les foyers les plus modestes, dont de nombreuses mères seules, sont les plus touchés. Ainsi, près d’un Français sur deux dont les revenus mensuels sont inférieurs à 1.200 euros estime ne pas être en mesure de s’offrir une alimentation variée et de faire trois repas par jours. C’est le cas d’Olga Lazurko, 34 ans, et Saousen B., 36 ans, respectivement mères de deux et quatre enfants, et bénéficiaires de l’aide alimentaire du Secours populaire.
« Remplir le frigo est devenu une source d’angoisse pour moi », raconte d’emblée et d’un ton posé Saousen. Cette vendeuse de profession, qui a perdu son emploi il y a un an et vit depuis du chômage, ne peut se passer de l’association. « Manger des fruits et légumes tous les jours et de la viande régulièrement, ce n’est pas possible. Ca coûte tellement cher! ». « Heureusement qu’il y a la cantine pour les enfants. Au moins, on sait que là-bas ils mangent équilibré et à leur faim », confie Olga dont les deux enfants sont en maternelle. « Oui, ça évite d’avoir à se demander ce que l’on va bien pouvoir mettre dans la casserole », abonde Saousen.
– « Pognon de dingue » –
Si toutes deux considèrent que l’aide du Secours populaire est « vitale », elle reste toutefois limitée. « Le plus dur, c’est quand les enfants me demandent pourquoi je ne leur achète pas des gâteaux et sucreries. J’ai pris l’habitude de leur répondre que c’est parce que ce n’est pas bon pour leurs dents même si je sais qu’ils ne me croient pas », relate Saousen. En 2017, le Secours populaire a accompagné près de 3 millions de personnes dont deux millions exclusivement pour l’aide alimentaire. Cette précarité alimentaire est, selon de nombreux observateurs, l’une des caractéristiques de la pauvreté dans les pays développés. « Ce que l’on constate avec ce sondage c’est que l’alimentation est devenu la variable d’ajustement du budget du foyer. On paye d’abord le loyer puis les charges et ensuite, avec ce qu’il reste, on pense à l’alimentation », décrypte Étienne Mercier de l’institut de sondage Ipsos.
Un constat partagé par Olga pour qui, « le plus important reste d’avoir un toit. Le reste, on se débrouille ». « Pour nous, cette misère n’est pas une nouveauté mais les résultats de ce sondage montrent que nous avons atteint un niveau d’alerte. La pauvreté ronge notre société », souligne Julien Laupêtre, président du Secours populaire. « Nous devons travailler à une nouvelle résistance pour ne pas laisser la pauvreté gagner davantage de terrain », a lancé cet ancien résistant. Il a par ailleurs appelé à défendre le Fonds européen d’assistance aux démunis (FEAD), qui arrive à échéance en 2020 et dont le renouvellement n’est pas assuré. « Il ne faut pas baisser la tête et refuser les discours qui consistent à dire que les pauvres sont pauvres parce qu’ils l’ont voulu », a-t-il ajouté.
Une allusion aux propos du chef de l’État qui avait déclaré à la mi-juin que les aides sociales coûtaient un « pognon de dingue » sans toutefois faire sortir leurs bénéficiaires de la pauvreté. L’opposition et certaines associations y avaient vu une forme de « pauvrophobie ». Le plan pauvreté, qui devait être initialement présenté mi-juillet en pleine Coupe du monde de football, sera dévoilé jeudi par le chef de l’Etat. En France, sixième puissance mondiale, neuf millions de personnes, dont trois millions d’enfants, vivent sous le seuil de pauvreté qui s’établit aux alentours de 1.000 euros par mois, selon l’Insee.
Par Alexandra DEL PERAL
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