Chronique La chronique de Camille

Gâteaux à l’école abusivement règlementés

20.06.17

C’est la saison des kermesses et des fêtes de fin d’année. Il y a quelques jours, la directrice de l’école maternelle nous a glissé une petite missive. Un de ces courriers qui ont le don de me mettre hors de moi. « Buffet pour la fête de l’école : Dans le cadre des mesures d’hygiène demandées par les services de l’Académie (…), nous demandons aux parents d’être particulièrement vigilants sur la qualité des denrées utilisées et de faire en sorte d’apporter des denrées achetées dans le commerce (en gras souligné dans le texte). Ainsi les emballages pourront être conservés pour en connaître la composition et limiter les risques. »

Après ce message quelque peu autoritaire, on comprend que les dangereux parents ont tout de même la possibilité d’amener des plats faits maison, à condition de respecter des précautions d’hygiène de base : désinfection des surfaces de travail, lavage des mains, vérification des DLC, conservation au froid… Soit les règles imposées par ailleurs dans la restauration, dans les labos de préparation culinaire et dans tout établissement où « les aliments sont remis directement au consommateur » (arrêté du 9 mai 1995).

Ce n’est pas la première fois que le chef de l’établissement scolaire de mes enfants sème la confusion. Il y a déjà cinq ans de cela, la directrice de l’école de ma fille aînée avait, du jour au lendemain, décidé d’interdire les gâteaux maison et imposé que l’on achète, pour les goûters d’anniversaire et fêtes diverses, des Papi Brossard  et autres saloperies industrielles bourrées de sucres, d’additifs et d’emballages plastique. Quand je lui ai fait part de ma consternation, elle m’a expliqué que cela faisait suite à un cas d’intoxication alimentaire avec un tiramisu maison, dans une autre école, et qu’elle préférait « ne pas prendre de risque ». J’ai compris alors que cette décision était la sienne, pas celle du ministère. Une manière de réinterpréter les règlements pour se simplifier la vie et couvrir son derrière. Car à aucun moment, la circulaire de 2002 intitulée « Sécurité des aliments : les bons gestes » ne suggère d’acheter des denrées industrielles. Au contraire, elle souligne que « les activités d’élaboration d’aliments dans les classes (…) ainsi que les goûters ou repas organisés par les parents d’élèves (…) sont des moments importants de la vie scolaire », mais qu’il est « important que l’élaboration de ces aliments soit faite en s’entourant de tout le soin nécessaire pour éviter les risques pour ces consommateurs ».

Où sont les pires scandales sanitaires? À la cantine!

Combien de parents liront cette lettre, s’arrêteront sur la partie soulignée en gras, y interprèteront une obligation, et oubliant leurs intentions de se mettre aux fourneaux pour la kermesse de leur marmot, se rabattront sur le supermarché ? Et pourtant, c’est bien là qu’existent les pires scandales sanitaires. Ou est-ce dans la restauration collective ? Ce n’est pas, que je sache, les gâteaux des mamans qui empoisonnent régulièrement les gamins à la cantine ! Tous les ans, la presse régionale répertorie des dizaines de cas d’intoxication alimentaire dans les écoles, suite au repas de midi. Pas plus tard qu’en avril dernier, 300 écoliers dans une cinquantaine de crèches et écoles de Seine-Maritime se sont retrouvés malades comme des chiens. Bilan des premières analyses : les matières premières utilisées par la centrale seraient en cause.

Alors arrêtons l’hypocrisie, les restrictions et les aberrations… Il faut militer pour le droit des parents à faire des bons trucs à manger pour les festins d’école ; se battre pour une meilleure alimentation, mieux sourcée et mieux cuisinée, à la cantine ; instaurer des ateliers de cuisine pour les écoliers ; mettre l’alimentation, les recettes et l’histoire culinaire au programme scolaire ; et faire comprendre aux enfants, à leurs parents et à leurs enseignants, que cuisiner, avec des bons produits et un peu de soin, c’est toujours meilleur pour la santé, pour le plaisir, pour le partage et même pour le porte-monnaie.

Photo : Blog Les douceurs de la famille Praline – Petit beurres maison pour la fête de l’école

Partagez moi !

Vous pourriez aussi être intéressé par

Chronique

Les britanniques majoritairement favorables à une taxe sur les aliments ultra-transformés

11.08.24
Selon un sondage publié aujourd'hui par Le Guardian (ICI en anglais), la majorité des Britanniques souhaite que de nouvelles taxes soient imposées aux entreprises produisant de la "malbouffe" ou des aliments ultra-transformés. Idée qui fait également son chemin en...

Chronique

De l’influence du CAC 40 sur la nourriture des athlètes des J.O.

02.08.24
Nombre d’articles de presse commentent depuis quelques jours la piètre qualité des repas servis aux athlètes du Village Olympique sans vraiment s’intéresser à la source : celle du mécanisme diabolique des marchés publics.

Chronique Au menu

Lettre d’info n°13 – Le temps des sucres

03.05.24
Le temps des sucres ou saison des sucres dure de 4 à 6 semaines de la mi-mars à la fin avril. Un temps éclair et pourtant fondateur de la culture Québécoise qui correspond à la mise en exploitation des...