Analyse Maladie des oliviers
Italie: lueur d’espoir dans la lutte contre « la lèpre des oliviers »
Au coeur de la région italienne des Pouilles, dévastée par la bactérie tueuse « Xylella Fastidiosa », certains oliviers restent mystérieusement verts. Résistantes, ces variétés offrent une petite lueur d’espoir dans la lutte contre ce péril qui menace tout le bassin méditerranéen.
Depuis son arrivée dans cette région aride, en 2013, probablement du Costa Rica, la « lèpre des oliviers » a provoqué la mort de plus d’un million d’arbres en Italie, et la facture s’est élevée à environ 1,2 milliard d’euros pour le deuxième exportateur mondial d’huile d’olive, derrière l’Espagne. Il n’y a pas de remède connu contre l’infection, qui a déjà touché l’Espagne, la France et l’Iran. Ces derniers mois, de nouveaux foyers ont été identifiés au Portugal, selon l’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA). Et les agriculteurs sont désarmés face à la propagation de la maladie, transmise par de petits insectes, qui bloque la capacité des plantes à absorber de l’eau. Elle « avance inexorablement vers le nord à la vitesse de plus de 2 km par mois », selon le syndicat des agriculteurs italiens Coldiretti, laissant derrière elle « un paysage spectral ».
Le seul moyen est d’abattre les arbres malades mais cela nécessite une autorisation spéciale des autorités italiennes qu’il n’est pas toujours facile d’obtenir, selon les agriculteurs. Et puis, il y a cette rumeur selon laquelle la mafia serait à l’origine de cette maladie pour pouvoir construire des hôtels sur les zones dévastées par la Xylella Fastidiosa. La solution semble ailleurs. L’ingénieur agronome du Conseil national de la recherche italien, Pierfederico La Notte, a identifié deux variétés d’oliviers qui miraculeusement semblent ne pas trop souffrir de la Xylella. « Les variétés Leccino et Favolosa représentent un point de départ, pas la ligne d’arrivée« , prévient-il. « Nous espérons, et nous y travaillons, trouver bien plus de variétés résistantes« , dit-il, faisant état de premiers résultats prometteurs.
Greffes prometteuses
Les branches de variétés résistantes qui ont été greffées sur les troncs d’oliviers malades poussent normalement et font même des fruits. Une lueur d’espoir pour cette région très dépendante de l’agriculture, qui a perdu des dizaines de milliers d’oliviers. L’agronome et producteur d’huile d’olive Giovanni Melcarne a, lui, perdu 90% de ses arbres, mais ne désespère pas et cherche des variétés immunisées. Il a construit une serre dans laquelle il fait pousser des dizaines de petits oliviers parmi lesquels il espère trouver la variété immunisée. « Nous allons inoculer la maladie à ces arbustes, on va les contaminer avec l’insecte qui porte la bactérie de manière à voir scientifiquement si ces plantes, des variétés indigènes que nous pourrions cultiver, seront immunisées contre la maladie« , dit-il. Mais il faudra encore au moins un an avant d’obtenir de premiers résultats, car la maladie met du temps à se manifester. Ce temps de latence facilite la propagation de la maladie.
Des drones utilisant des caméras infrarouge peuvent aider à détecter la maladie un peu plus tôt mais n’empêchent pas sa progression inexorable. La Xylella Fastidiosa est considérée comme l’une des bactéries les plus dangereuses pour les végétaux à l’échelle mondiale et provoque diverses maladies pouvant conduire à leur mort. La maladie touche environ 350 types de plantes, dont des vignes, des citrons ou des amandiers.
« Bactérie fastidieuse, pas facile à contrôler, pas facile à manipuler »
Les chercheurs estiment que le risque de diffusion de la maladie est réel dans tout le bassin méditerranéen où l’huile d’olive est un élément incontournable du régime alimentaire et essentielle pour l’économie. C’est pour cette raison que l’Institut international d’agronomie de Bari (CIHEAM) a décidé de former aussi des ingénieurs agronomes provenant du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Experts débutants et confirmés de la région méditerranéenne sont ainsi réunis sur le campus du CIHEAM, où une application a été développée afin de permettre aux agriculteurs de repérer les symptômes, évaluer l’évolution de la maladie, dans l’espoir de la ralentir.
Alors que « rien n’est impossible » dans le domaine scientifique, la Xylella est particulièrement problématique, relève Arafat Hanani, un jeune étudiant palestinien. « La Xylella Fastidiosa est une bactérie fastidieuse, pas facile à contrôler, pas facile à manipuler« , constate-t-il, avant de retourner à son microscope dans l’espoir de trouver la solution définitive, mais insaisissable pour le moment.
Par Charles Onians pour AFP
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