Analyse Économie

Agroalimentaire: la France exporte moins vers l’UE, « déficit de compétitivité » pour Bercy

18.10.18

Les exportations françaises de produits agricoles et alimentaires vers les pays de l’Union Européenne se réduisent, en raison essentiellement d’un « déficit de compétitivité » du secteur, estime Bercy.

Selon les derniers chiffres publiés mardi par le ministère de l’Agriculture, portant sur août, l’excédent agroalimentaire de la France a baissé de 22 millions d’euros à 514 millions d’euros. Avec les seuls pays de l’UE, en août, la France a réalisé un déficit commercial agroalimentaire de 132 millions d’euros, qui s’est creusé par rapport à celui de l’an passé (-103 millions d’euros), en raison d’une baisse des exportations de 71 millions d’euros (-2%) plus importante que la diminution des importations (-43 millions d’euros, soit -1%), ajoute Agreste, le service statistique du ministère de l’agriculture.

Le recul des parts de marché de la France vers les pays de l’UE dans le secteur agroalimentaire « résulte surtout d’un déficit de compétitivité, qui expliquerait plus de 70% de la réduction du solde » souligne le Trésor dans une note publiée mardi. Ce qui est d’autant plus dommageable que le secteur agricole et alimentaire est l’une des principales forces du commerce extérieur de la France, constituant le troisième excédent sectoriel derrière le secteur aéronautique et la chimie, grâce surtout à ses vins et ses céréales.

Coût du travail

Le Trésor souligne que « le manque de compétitivité est patent dans le secteur des produits transformés », c’est-à-dire la myriade de PME qui constitue l’essentiel des producteurs français de charcuteries, fromages, pâtisseries et surgelés français. « Le coût du travail dans l’industrie agroalimentaire est plus élevé et a augmenté plus vite que chez ses principaux concurrents européens depuis les années 2000 » indique la note. Le coût horaire français dans les industries agroalimentaires s’est accru de 54% entre 2000 et 2017 contre une hausse de 34% en Allemagne. Ce différentiel s’explique pour partie par le recours à des prestations de service par des travailleurs détachés de l’Europe de l’Est en Allemagne, « en particulier pour l’abattage et la découpe de la viande », admet la note.

Bercy parie sur « les mesures récentes d’allègement du coût du travail » pour « améliorer la compétitivité-coût de l’économie et contribuer à dynamiser les exportations ». Mais la note met en cause d’autres facteurs pour expliquer le manque de compétitivité du secteur, au premier rang desquels « la taille des exploitations agricoles », qui sont restées en France, et grâce à la Politique agricole commune (PAC), des exploitations de type familial, dont la moyenne est inférieure à 100 hectares dans l’élevage par exemple. Bercy reconnaît qu’une concentration des exploitations agricoles a eu lieu en France au cours de la dernière décennie, mais souligne que le mouvement est « moins marqué » qu’en Allemagne, aux Pays-Bas et en Espagne. Ceci a pu limiter les économies d’échelle, souligne la note sans s’interroger sur le fait qu’il pourrait s’agir aussi d’un choix de société pour maintenir un tissu social et rural dense.

Bercy vise aussi « le niveau élevé de la fiscalité sur la production, les réglementations environnementales, un manque d’intégration des filières (entre l’amont et l’aval) ou encore l’inadéquation de certaines productions françaises à la demande internationale ». La note du Trésor estime que pour augmenter ses volumes d’exportation, l’agroalimentaire français doit viser des « offres de milieu de gamme en valorisant la traçabilité et la qualité sanitaire des productions françaises », notamment « pour les filières animales ». Les efforts de recherche et d’investissement devraient « davantage viser la montée en gamme de la production pour reconquérir le marché européen » ajoute la note en soulignant que la superficie exploitée en agriculture biologique en France « a augmenté moins rapidement que les ventes de produits sous label AB, tant en Europe qu’en France » depuis la fin des années 2000.

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