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Paris, ville comestible? Porte de Versailles, une ferme urbaine va sortir du béton

24.02.20

Sur le toit d’un hall du parc des Expositions de Paris, une énorme ferme urbaine sort peu à peu du béton. Un test pour jauger la capacité des villes à se nourrir elles-mêmes un jour, au moins partiellement.

Lorsqu’elle sera terminée en 2022, la « plus grande ferme urbaine sur un toit en Europe », selon ses promoteurs, devrait compter 14.000 mètres carrés cultivés par une vingtaine de maraîchers produisant au moins une tonne de fruits et légumes par jour. Coût total de l’investissement: 700.000 euros que Nature en ville, la société chargée de mettre le projet en oeuvre, espère rentabiliser via la vente de légumes frais dans des restaurants du voisinage, mais surtout des animations, événements privés ou publics, séminaires et activités sur le site.

A terme, les exploitants aimeraient aussi alimenter en produits frais des cantines scolaires aux alentours. Le maraîchage technologique à l’air libre, inclus dans un vaste projet de modernisation immobilière et architecturale du parc Paris Expo-Porte de Versailles, se veut agricole, productif, nourricier, et accessible au public citadin, indique à l’AFP Auriane Roussel, porte-parole de Nature en ville. Totalement privé, ce projet souhaité par le gestionnaire du parc, Viparis, n’est pas inscrit dans le plan Parisculteurs financé par la mairie de Paris, qui a déjà permis en quelques années l’éclosion d’une constellation de jardins partagés, micro-fermes, toits cultivés ou caves à champignons dans la capitale.

– Aéroponie et hydroponie –

Installée sur le toit d’un hall d’exposition où se tient dès samedi le salon de l’agriculture, la ferme urbaine ouvrira ses portes fin avril avec, dans un premier temps, 4.500 mètres carrés cultivés pour une production visée de 300 kilos de fruits et légumes par jour. Deux techniques de culture sont prévues, développées par la start-up Agripolis, spécialisée dans les fermes perchées sur des centres commerciaux. Dans des cultures en aéroponie, des tubes verticaux troués accueilleront les racines d’herbes aromatiques, salades, fraises, radis… Elles seront douchées d’une vapeur d’eau et de nutriments, pour moitié naturels et pour moitié de synthèse.

Pour d’autres cultures, en hydroponie, poivrons, aubergines, tomates ou courges pousseront en bac sur un substrat de déchets de noix de coco broyés, irrigués par le même liquide nutritif. Signe de l’attrait actuel pour l’agriculture urbaine, deux concurrentes d’Agripolis seront présentes au salon de l’agriculture: l’allemande In Farm, qui a créé un potager urbain au dessus de l’enseigne Metro à Nanterre et fournit des chefs parisiens en herbes fraîches, ainsi que la française Agricool, qui vient d’inaugurer une « ferme urbaine » de containers connectés à La Courneuve (Seine Saint-Denis). « Nous ne nous focalisons pas sur la compétition, le monde de l’agriculture est large et les solutions le sont aussi. Il est sain aujourd’hui de voir que nous sommes de plus en plus nombreux à oeuvrer pour une agriculture plus durable et une alimentation plus saine« , affirme Florian Cointet, responsable d’In Farm France, qui emploie 15 salariés.

– « Reconnecter les citadins à leur alimentation » –

« Notre objectif est autant de produire des légumes en ville en suivant les saisons que de reconnecter les citadins à leur alimentation« , nuance Mme Roussel. Pour cela, 135 carrés de culture, dont 80 déjà réservés, seront loués à des Parisiens ou banlieusards aux pouces verts. L’adhésion annuelle est de 80 euros et le loyer mensuel de 20 euros. « L’agriculture urbaine seule ne pourra pas nourrir les villes, mais elle pourra y contribuer« , ajoute Mme Roussel. Reste une inconnue de taille: le climat. A la différence de la ferme urbaine de Lyon et du modèle d’Agricool, où humidité, température, gaz carbonique et lumière sont contrôlés par ordinateur, les cultures ici seront exposées aux intempéries, sans serre protectrice.

Une incertitude qui ne décourage pas les promoteurs de ces nouvelles formes de production alimentaire urbaine. « Il y a toujours eu un retour de l’agriculture urbaine pendant les crises« , constate Marie Dehaene, ingénieure en paysage employée par « Sous les fraises », qui a notamment végétalisé le toit du grand magasin BHV à Paris. « Pendant les deux guerres mondiales, le carreau du Louvre était planté de poireaux, et vous aviez des lapins dans les caves, et des poules sur les balcons haussmanniens« .

Isabel MALSANG pour AFP

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