La science se cherche Santé

Le dioxyde de titane interdit début 2020 dans les denrées alimentaires

18.04.19

Après des tergiversations, le gouvernement a décidé mercredi d’interdire en janvier 2020 le dioxyde de titane, un additif controversé, dans les denrées alimentaires, une décision qui laisse les ONG sur leur faim.

Cette décision intervient deux jours après la publication d’un avis de l’agence sanitaire Anses qui disait ne pas pouvoir lever les incertitudes sur l’innocuité de cette substance, signalée sur les étiquettes par TiO2 ou E171 et utilisée principalement comme colorant. Après avoir pris connaissance de cet avis, « François de Rugy, ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, et Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, ont décidé, par précaution, d’interdire la mise sur le marché des denrées alimentaires contenant cet additif dès le 1er janvier 2020″, selon un communiqué.

« Un arrêté suspendant la mise sur le marché des denrées alimentaires contenant l’additif E171 à partir du 1er janvier 2020 a été signé et sera publié dans les meilleurs délais », précise-t-il. Cet arrêté sera notifié à la Commission européenne et aux autres États membres car le dioxyde de titane bénéficie d’une autorisation délivrée au niveau de l’Union européenne. Cette décision « n’est que dans l’ordre des choses », a réagi Stephen Kerckhove au nom des associations Agir pour l’environnement et Foodwatch. « On voit apparaître un délai dont il n’a jamais été question« , a-t-il regretté.

Aussi présent dans dentifrices et médicaments

Le fait que cette substance contienne des nanoparticules – d’une taille inférieure à 100 nanomètres facilitant leur pénétration dans l’organisme – soulève depuis plusieurs années l’inquiétude des associations de défense des consommateurs et de l’environnement. Face à ces doutes, Brune Poirson avait annoncé en mai 2018 la suspension de son utilisation dans les produits alimentaires d’ici fin 2018. La disposition avait été reprise dans la loi alimentation promulguée en novembre mais elle ne pouvait s’appliquer sans un arrêté du ministère de l’Économie. Mais Bruno Le Maire avait refusé de signer cet arrêté dans un premier temps en janvier, avant de se dire prêt à interdire le colorant, sous réserve d’un nouvel avis de l’agence sanitaire Anses.

Dans cet avis rendu lundi, l’agence a analysé 25 nouvelles études sur la toxicité du dioxyde de titane par voie orale, parues depuis son dernier avis en 2017. Et soulignant « le manque de données scientifiques », elle conclut « qu’elle ne dispose pas d’éléments nouveaux permettant de lever les incertitudes sur l’innocuité de l’additif E171″. Ces études ne permettent notamment pas de « confirmer ou d’infirmer le potentiel » cancérogène. L’Institut national de la recherche agronomique (INRA) avait estimé en 2017 que l’exposition au E171 favorisait la croissance de lésions pré-cancéreuses chez le rat. Sans que ces résultats ne permettent de conclure sur ses effets sur l’homme.

En juillet, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait estimé que cette étude et trois autres soumises par la France ne remettaient pas en cause son évaluation de 2016, qui concluait que le dioxyde de titane n’était « pas de nature à entraîner un risque sanitaire ». Le mois suivant, la Commission européenne lui commandait toutefois un nouvel avis, attendu pour mi-2019, qui devra se pencher en particulier sur la taille des particules. Face aux critiques, certains industriels ont annoncé retirer le dioxyde de titane de leurs recettes ou magasins, comme Carambar and Co de ses Malabar ou encore Carrefour, Super U, Leclerc, Picard et William Saurin.

Mais d’autres ont mis en avant des délais d’adaptation. Le dioxyde de titane reste autorisé pour les cosmétiques (dentifrice) et médicaments, pas concernés par la loi alimentation, ce que regrettent les ONG. Le président de l’UFC-Que Choisir Alain Bazot a ainsi dénoncé un arrêté « sans réelle cohérence » en raison de sa limitation aux denrées alimentaires. « On est dans la caricature de l’application du principe de précaution dont se prévaut le ministre« , a-t-il estimé.

Par Laure Filon pour AFP

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