Arrivés à Bayonne, on s’est rappelé de Julien à Bordeaux qui nous avait dit de tester la cidrerie de la rue des Cordeliers et son fameux « cidre » basque, le Sogarno. Sur le chemin, nous avons découverts quelques auberges et goûté quelques produits relevés de piment d’Espelette ainsi que l’association Erleak montée par des apiculteurs amateurs.
Bayonne semblait être une ville très belle, avec de nombreuses maisons au style un peu ancien dans le centre-ville, colorées et biscornues. On a longé la Nive et trouvé la rue des Cordeliers.
Le chemin
La cidrerie était fermée mais juste à côté se trouvait l’Auberge du petit Bayonne. C’était plein et on voyait bien que ça allait être dur de se faire une place. Je suis allé demander au serveur qui m’a répondu tout embarrassé que ce n’était pas possible, même plus tard. Il s’est arrêté en plein service, m’a dit que je pouvais aller de sa part au Chistera, à 5mn de là, rue Port Neuf. C’était parti. On a marché un peu dans Bayonne, très animée, et on a fini par tomber sur le Chistera. Le patron nous a reçus avec un grand sourire et l’accent du sud-ouest : « vous arrivez d’où comme ça ? Vous faites le chemin ? ». Le chemin c’est la route de Saint Jacques de Compostelle. « Nan, pas notre truc ». On a commandé une assiette de charcuterie/soupe de poisson en entrée, poulet basquaise/piperade à suivre et café. Je recommande le Chistera ! On y mange bien, pour pas trop cher, sous les arcades dans une petite rue de Bayonne, et dans une ambiance parfaite. On y a laissé nos sacs. Le nez en l’air, on a pris une rue, puis une autre, pour digérer. On a suivi des remparts qui nous ont mené à une forteresse où des chèvres broutaient, puis Porte d’Espagne. Bon, on flânait.
Apiculteur amateur
Une petite boutique a attiré l’attention de Siméa. C’était l’étal de l’association Erleak montée par des apiculteurs amateurs pour promouvoir l’apiculture et le respect de la biodiversité, en proposant de protéger une espèce locale, l’abeille noire. On a commencé à échanger quelques mots avec le jeune homme qui tenait la permanence.
– Tout le monde peut faire du miel ?
– Oui, vous, moi, il suffit d’une ruche. Ca ne prend pas beaucoup de temps et, en plus, moins on les ennuie, plus les abeilles bossent. Il ne faut pas tout le temps y mettre le nez. En gros, il faut prendre soin d’elles d’avril à juin. Si on les laisse faire, on a un miel toutes fleurs. Si on veut du miel de châtaigner ou d’acacia, c’est un tout petit peu plus compliqué. Il existe des périodes qu’il faut connaître, suivant les floraisons des arbres, où l’on récolte le miel.
– Donc l’abeille va chercher du pollen et fait du miel dans la ruche ?
– La ruche, c’est là où elles vivent. Au-dessus de la ruche se trouve la hausse, c’est leur réserve de nourriture qui se trouve dans un gros tiroir où sont placés des cadres à la verticale. Les abeilles remplissent le cadre avec du miel et l’apiculteur récupère le cadre. Il vaut mieux en laisser un ou deux remplis, car si un cadre est vide les abeilles feront tout pour le remplir. Malheureusement, souvent les apiculteurs enlèvent tout car ils savent qu’elles referont tout. On tire le profit maximum de la situation, quitte à épuiser les abeilles ! Ce n’est évidemment pas la logique que veut défendre l’association, qui souhaite plutôt produire du miel en accord avec les petites ouvrières rayées jaune et noir.
Dans la boutique, on trouve du miel, des ustensiles pour les ruches, des tenues, de l’hydromel qui n’est rien d’autre que du miel et de l’eau qu’on laisse fermenter. On trouve aussi du pollen. « Ce qui peut être controversé », nous dit le jeune homme, « car il se récolte avec une grille qu’on ne laisse que deux heures par jour maximum. Cette grille brosse les abeilles transportant le pollen que l’on récupère. Mais les abeilles travaillent pour rien dans ce cas, ce qui n’est pas forcément bon. La propolis par contre ne pose pas ce genre de problème car c’est une substance qui sert à réparer la ruche et, avec le miel de thym, on commence à l’utiliser de plus en plus dans le secteur médical. »
Il y avait aussi de la gelée royale, nourriture destinée à une larve qui deviendra la reine. Le jeune homme nous explique : « On ne sait pas vraiment comment elles choisissent la larve qui deviendra reine, mais c’est parce que cette larve est nourrie avec de la gelée royale qu’elle deviendra assez forte pour être reine. » Il s’amusait, notre apiculteur amateur, à nous dire que même si l’homme travaille avec l’abeille depuis 10 000 ans, aujourd’hui encore on n’y comprend rien, vu qu’elles ont un fonctionnement social très particulier et, qui plus est, différent d’une espèce à l’autre. Sur ces mots, nous avons laissé le jeune homme.
Cidre basque
Nous, on allait voir cette fameuse cidrerie rue des cordeliers. C’était ouvert. Il n’y avait pas grand monde, la salle était superbe et l’accueil sympathique. De grandes poutres apparentes traversaient le plafond, de grandes tables et des bancs étaient installés dans la pièce. Le menu avait l’air tentant et il fallait bien goûter à ce fameux « cidre » basque, le Sogarno. « Attention, ça s’oxyde vite, on en boit peu et rapidement » nous explique la patronne. Dans le fond de la pièce, vers le comptoir, se trouvaient deux grands tonneaux avec des robinets. Pour faire chanter un peu le sogarno, il fallait ouvrir le robinet, un jet de cidre en sortait pour frapper le verre, le reste tombait dans une gamelle prévue à cet effet. Le cidre avait un goût de pommes brutes, légèrement pétillant, rien à voir avec du cidre normand. La patronne nous a expliqué qu’une cidrerie c’est un endroit où l’on se retrouve et qu’avec ce système de tonneaux, on passe une bonne partie du repas debout. Le sogarno est à volonté. Pour accompagner, j’ai pris le menu pour pas mourir con : omelette à la morue, merlu à l’espagnole, chuleta (côte de bœuf), fromage de brebis avec noix et pâte de coing, café et sogarno au tonneau. Tout était délicieux, mais la chuleta m’a tué, une viande comme du beurre, tendre et savoureuse. Juste à la voir ça faisait plaisir et à la manger c’était l’extase.
De Bayonne, on a rejoint l’intérieur du Pays Basque, pour suivre les conseils d’Iban et tenter de grimper sur l’Artzamendi, « la montagne de l’ours », mais avec nos gros sacs sur le dos nous n’avons pas réussi à atteindre le sommet. Du coup, on a planté la tente au bord de la Nive avec deux cyclistes qui faisaient le tour du pays basque en tandem. On s’est fait un festin avec les trucs du coin. Nous avions du saucisson et du pâté au piment d’Espelette. Eux avaient du pâté aux poivrons et ont cuisiné du riz à la piperade. On a fait griller des saucisses au feu de bois qu’on a étalées sur du pain à la tomate, fromage et gâteau basque pour finir. On était bien là, il n’y avait pas grand monde et la rivière coulait au milieu des arbres.
Erleak
Voyage dans le monde des abeilles
31 rue d’Espagne, 64100 Bayonne
tél : 05 59 55 11 32
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