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Les producteurs de choux à choucroute craignent pour leur avenir

par AFP
07.08.15

« On attend en vain la pluie mais on n’y croit plus trop« , soupire Laurent Heitz, producteur de choux à choucroute à Geispolsheim (Bas-Rhin): en raison de la météo, la récolte de ce légume alsacien emblématique s’annonce très maigre, faisant même craindre pour l’avenir de la filière. Sur une de ses parcelles, écrasée de soleil, l’agriculteur, également président du syndicat des producteurs de choux à choucroute, contemple des choux dont la tête vert pâle, noyée autour de grandes feuilles vert foncé, paraît minuscule. Certains choux n’ont même pas de tête. « Les têtes des choux pèsent au maximum 2 kg alors qu’elles devraient en faire six ou sept« , constate Laurent Heitz. L’exploitant aurait dû commencer à récolter début août la variété précoce des choux à choucroute mais préfère attendre encore quelques jours, espérant voir ses légumes faméliques grossir un peu. L’Alsace, qui produit 70% de la choucroute consommée en France, compte une soixantaine de producteurs de choux à choucroute, exploitant environ 700 hectares. La récolte des différentes variétés se déroule d’août à décembre. Cette année, en fonction des précipitations qui tomberont en septembre, elle devrait être inférieure de 25 à 50% à la normale.

Chaleur nocturne

Si les choux ont souffert cette année du manque de précipitations, ils ont plus encore pâti des très fortes chaleurs, avec des températures restant élevées la nuit, qui ont bloqué leur croissance. « Vingt-huit degrés, pour le chou, c’est bien. A partir de 32-35 degrés, la plante ferme les pores par lesquels elle transpire, les feuilles se recroquevillent« , explique Jean Klieber, conseiller référent pour le chou à la chambre d’agriculture d’Alsace. « Le climat change vraiment: cela ne serait jamais venu à l’esprit aux anciens d’irriguer les choux!« , s’exclame-t-il. Certains agriculteurs alsaciens, notamment ceux qui produisent à la fois des choux à choucroute et du maïs, ont en effet utilisé cet été leur système d’arrosage pour leurs choux. Sans pour autant parvenir à des rendements vraiment satisfaisants. « Le risque, c’est qu’on n’arrive pas à livrer en choucroute tous les clients cette année, et pourtant, nous avons eu les moyens d’irriguer, contrairement à d’autres producteurs« , note Florent Ades, producteur de choux à Krautergersheim, un village qui revendique le titre de « capitale de la choucroute ». Avec un prix payé aux exploitants de 69 euros la tonne, il faut produire 80 tonnes de choux à choucroute par hectare pour être rentable. Plus du double des quantités attendues cette année pour les variétés précoces non-irriguées. « Le jour où je serai obligé d’investir dans l’irrigation, si on ne touche pas 80 euros la tonne, j’arrêterai le chou, je ferai du maïs« , tranche Laurent Heitz, ajoutant que « cela coûte 600 euros par hectare d’irriguer les choux« .

Acheter des choux aux Pays-Bas ou en Pologne?

Ce coût viendrait s’ajouter à la longue liste des contraintes liées à la culture du chou, qui exige une main-d’oeuvre nombreuse pour la plantation et la récolte. L’inquiétude des acteurs de la filière s’étend donc bien au-delà des grosses chaleurs de cet été, qui font craindre une « année blanche ». D’année en année, ils constatent une détérioration des conditions climatiques, qui les obligera tôt au tard à adapter leurs méthodes de production. Les choucroutiers d’Alsace seront-ils un jour obligés d’acheter leurs choux aux Pays-Bas ou en Pologne? Sébastien Muller, président de l’Association pour la valorisation de la choucroute d’Alsace (Avca), ne veut pas envisager cette hypothèse. « Il faudra changer les habitudes, peut-être mieux valoriser le produit, mais on n’abandonnera pas l’Alsace, on veut défendre notre label de qualité », insiste-t-il. En France, la choucroute d’Alsace est protégée depuis octobre 2012 des imitations par une Indication géographique protégée (IGP), que les producteurs espèrent voir bientôt reconnue à l’échelle européenne.

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