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Laurent Dupont : Petite étude des outils de chefs

15.10.14

19.000 km, 540 jours de travail, 46 chefs, 46 outils, 46 histoires. C’est en chiffres ce que représente « Le prolongement du geste », premier ouvrage de Laurent Dupont.

En se penchant sur les liens qui unissent en cuisine le chef et son outil, Laurent Dupont, photographe, historien d’art et passionné de cuisine, souhaite revenir à l’élémentaire, à un savoir-faire à la base du métier de cuisinier : le geste. Manié, usé, façonné par des heures de travail, l’outil est le prolongement de la main de son utilisateur comme le témoin de sa sensibilité. Il est aussi le prolongement du geste, cet instant où le mouvement va se saisir de la matière pour créer, l’art de la gestuelle apparentant les cuisiniers aux artisans comme aux créateurs. « Petite étude des outils de chefs en cuisine », c’est le sous-titre de l’ouvrage, une occurrence d’une simplicité à toute épreuve qui nous indique ce que l’on va y trouver : des outils et des hommes. En noir et blanc, uniquement à l’argentique, articulant deux photos (une de l’objet brut et une autre de l’objet vivant en train d’être manipulé), une typographie, ainsi qu’une histoire, on ne pouvait imager un ouvrage d’une plus grande simplicité. On y retrouve cette beauté simple des objets ordinaires, inspirée par le travail du photographe Walter Evans qui avait publié en 1955 dans le New-York Times une série de photos intitulée ‘beauties of the common toll’ (la beauté du quotidien).

L’ouvrage est aussi une incursion dans la tête des quarante-six chefs choisis. Ecrites par Laurent Dupont ou par les chefs eux-même dans certains cas, on y découvre des histoires sensibles, des bouts d’existence qui relient les chefs à ces objets. Il y a la gomme et le crayon de Pierre Gagnaire qui sont une leçon de vie : « On passe son temps, dans la vie, à avoir des regrets, à empiler des choses et des choses qu’on a mal faites et qui restent malgré tout. Le crayon et la gomme offrent cette liberté de revenir en arrière. Le geste qui les accompagne résume ma cuisine. Elle est une espèce d’esquisse, de tentative perpétuelle de trouver la juste note, le juste goût, la bonne idée, celle qu’on trouvera toujours demain. » ; les petites cuillères qu’Alexandre Gauthier, pratiquement devenues un trouble obsessionnel compulsif, qu’il retrouve « là où on les attend le moins » mais aussi la batte de boucher de Michel Troisgros qui raconte l’historique saumon à l’oseille, l’insolite forêt du chocolatier Nicolas Cloiseau, mais aussi le couteau ou la casserole, plus évidents, ou la pince qui fait de l’œil au Japon. Au final, chacune de ces quarante-six histoires montre autrement la cuisine contemporaine, car le cuisinier au travers de son prolongement se raconte différemment, plus intimement. A l’heure où les ouvrages sur les chefs se multiplient, celui-ci à l’avantage de la sobriété et d’un récit essentiel.

Le prolongement du geste
Laurent Dupont
Keribus éditions
En librairie à partir du 15 octobre
Prix de vente : 29,90€

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