Analyse Politique

700 jeunes agriculteurs sous les ors de l’Élysée

22.02.18

A deux jours de l’ouverture de l’incontournable Salon de l’Agriculture, Emmanuel Macron a voulu rassurer jeudi le monde agricole français en promettant notamment la mise en place de « verrous réglementaires » sur les achats de terres agricoles par des étrangers. « Je ne suis pas là pour plaire, je suis là pour faire« , a lancé le président français devant quelque 700 jeunes agriculteurs parfois surpris d’être invités sous les ors de l’Élysée.

Prônant une « révolution culturelle », le chef de l’État a fustigé les générations de dirigeants qui l’ont précédé et se sont contentés de « tapoter les vaches« , notamment lors du Salon de l’Agriculture, rendez-vous inévitable pour tout président français, qui ouvre ses portes samedi à Paris. M. Macron a assuré que l’invitation à l’Élysée n’avait pas été lancée pour acheter la paix avant cet événement toujours très médiatique, alors que mercredi encore des agriculteurs manifestaient dans toute la France contre un accord avec le Mercosur. Il s’est néanmoins lancé dans ce que plusieurs médias ont appelé une « opération séduction » envers les agriculteurs, lui qui est parfois brocardé comme le président des riches, des villes et des gagnants de la mondialisation.

Le président a ainsi annoncé la mise en place prochaine de « verrous réglementaires » sur les achats de terres agricoles par des étrangers en France, alors que l’acquisition récente par un investisseur chinois de 2.600 hectares de terres à blé dans le centre du pays a provoqué un vif émoi. « Pour moi, les terres agricoles en France, c’est un investissement stratégique dont dépend notre souveraineté, donc on ne peut pas laisser des centaines d’hectares rachetés par des puissances étrangères sans qu’on sache la finalité de ces rachats« , a dit le président.

Aucune réduction de nos standards de qualité

Le président était également très attendu sur le dossier Mercosur. Alors que les négociations pour un accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur ont repris à Asunción, les éleveurs français, frappés par une crise, craignent la concurrence générée par l’importation chaque année en Europe de 70.000 tonnes de viande bovine sud-américaine, sans droits de douanes. Ils accusent par ailleurs les producteurs latino-américains d’élever du boeuf aux hormones, sans que cela soit traçable. « Il n’y aura jamais de boeuf aux hormones en France, il ne faut pas jouer avec les peurs des gens« , a martelé M. Macron devant les agriculteurs. « Il n’y aura aucune réduction de nos standards de qualité, sociaux, environnementaux, ou sanitaires à travers cette négociation« .

Sur le problème plus global de l’accès au foncier pour les jeunes générations d’agriculteurs, M. Macron a demandé qu’on « imagine » un système de « pré-retraites agricoles avec une sortie progressive de l’activité » afin de permettre à un jeune de prendre la suite de ses parents. Le président a par ailleurs annoncé un nouveau dispositif de prêts garantis pour les jeunes agriculteurs à hauteur d’un milliard d’euros dans le cadre du plan de financement de cinq milliards d’euros déjà promis. Les jeunes agriculteurs, qui ont déjeuné sous les lustres de cristal de la Salle des fêtes en présence de plusieurs ministres et de l’épouse du président Brigitte Macron, ont accueilli le discours du chef de l’État avec une certaine prudence. « Les idées dont il a parlé sont intéressantes. Mais on attend les actes« , a réagi Eloïse Thirouin, 28 ans, maraîchère dans le sud-est de la France, qui a regretté un peu que le président n’ait parlé que « de viande, de vaches, peu des autres secteurs« . « Le discours est un peu rassurant. Mais c’est dommage que ce n’ait pas été un dialogue, qu’on ne puisse pas lui poser des questions au micro« , a ajouté Thibault Tauzia, un éleveur de poulets.

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