Situation inédite sur le marché mondial des viandes, les ravages de l’épidémie de peste porcine africaine en Chine, mais aussi en Europe, font fortement augmenter les cours du porc, une aubaine pour les éleveurs du monde entier en cette année chinoise du cochon.
Selon le rapport annuel Cyclope sur les matières premières, publié la semaine dernière, les cours du porc ont augmenté de 18% en Europe depuis début mars 2019, « alors que le Japon et la Corée du Sud, fortement importateurs, commencent à constituer des stocks de sécurité ». En France et en Allemagne, les cours du porc ont « augmenté de 30% depuis le début de l’année en raison de la Chine » précise à l’AFP Jean-Paul Simier, consultant en économie agricole et agroalimentaire, rédacteur du chapitre sur les viandes du rapport Cyclope.
En cause, les besoins énormes de la Chine, qui produisait jusqu’à présent 55 millions de tonnes de viande porcine par an, soit 45% du total mondial, et qui est aussi le premier consommateur mondial de cette viande. Depuis son arrivée en Chine notifiée mi-2018, vraisemblablement via des sangliers venant de Russie, la propagation de la maladie a été fulgurante dans un pays qui accueille « près de la moitié » des cochons vivant sur la planète, souligne l’Agence des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) dans son rapport Food Outlook publié le 9 mai.
La maladie hémorragique, sans danger pour l’homme, est très contagieuse et destructrice pour les sangliers comme pour les porcs d’élevage. Alors qu’en septembre 2018, une quinzaine de foyers étaient déclarés dans six provinces, le virus s’est propagé dans tout le pays, d’abord vers la partie centre-est de la Chine. Les autorités chinoises ont réagi avec des mesures de police sanitaire, interdisant les transports d’animaux vivants et abattant des dizaines de milliers de porcs.
Vers des prix « jamais atteints » ?
Mais la maladie a continué de progresser, apparaissant dans la région de Pékin en novembre, puis dans celle du Sichuan au sud-ouest en décembre, la principale région productrice de porcs en Chine (65 millions par an). « Début 2019, vingt provinces chinoises sont touchées et un million de porcs ont été abattus pour raison sanitaire et retirés de la consommation » souligne Cyclope. Les dernières apparitions de la maladie déclarées par la Chine se rapprochent de la frontière du Laos au sud du pays, selon une carte publiée par la FAO. L’épidémie a même atteint l’île tropicale de Hainan. Le Vietnam, le Cambodge et la Mongolie sont aussi touchés. Dans ces trois pays, près de 100.000 porcs ont été abattus.
Ces évolutions signifient que la Chine devrait massivement importer de la viande de porc pour compenser ses propres pertes, estime Jean-Paul Simier. « La Chine est le marché déterminant de la viande de porc, il faut bien comprendre que 700 millions de porcs vivent au quotidien en Chine, contre 20 millions en France par exemple » souligne l’expert. Selon la FAO, la peste porcine « pourrait provoquer une baisse de 20% des stocks de porcs en Chine« .
Selon les estimations plus prudentes de l’expert français, prenant en compte d’autres sources, la production chinoise de porcs devrait baisser de 10%, soit de près de 6 millions de tonnes en 2019. « Ce qui est déjà gigantesque, car le commerce international de la viande s’élève seulement à quelque 10 millions de tonnes par an » relève-t-il. « Si la situation sanitaire dérapait, on pourrait atteindre des prix qu’on n’a jamais atteints pour la viande de porc » estime-t-il. Déjà en 2014, le marché chinois avait « sauvé » les éleveurs porcins européens en crise, brusquement privés du débouché russe après l’embargo sur l’alimentation européenne imposé par Vladimir Poutine.
Par Isabel Malsang pour AFP
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