La science se cherche Santé

États-Unis : faire ses courses avec son médecin

05.12.16

Alors que la France se débat dans ses expériences d’étiquetage alimentaires, aux Etats-Unis, ce sont les professions de santé qui sont directement mobilisées, on fait désormais ses courses avec son médecin ou une infirmière.

« Est-ce que c’est bon pour la santé? », « ça fait grossir? », « je peux le remplacer par quoi? »… Beaucoup de consommateurs aimeraient avoir un spécialiste à leurs côtés pour les aider à résoudre ces dilemmes quotidiens au supermarché. Le programme « Shop with your Doc » (« Faites les courses avec votre médecin »), organisé par un réseau d’hôpitaux, envoie médecins et nutritionnistes à la rescousse, pour promouvoir la santé dans l’assiette à l’heure où l’obésité touche un tiers des Américains. Chih-I Lee admet une faiblesse pour les sodas ultra-sucrés. Sara Foronda s’inquiète du diabète, qui touche beaucoup de membres de sa famille, mais a du mal à résister aux gâteaux secs. Mike Keegan tente d’acheter des produits biologiques mais ils ne sont pas toujours dans ses moyens. Tous promènent leur chariot dans les allées d’un supermarché d’Irvine, ville de 260.000 âmes à 60 km au sud-est de Los Angeles, où ils tombent sur une femme en blouse blanche: Monica Doherty, infirmière spécialisée dans la médecine familiale. Elle apprend « aux gens à choisir des produits sains pour les aider à être en meilleure santé possible« , brisant les idées reçues sur l’alimentation, dispensant conseils et recettes: remplacer la purée de pommes de terres par celle de choux-fleur, plus légère, ou les sodas par de l’eau gazeuse sans sucre.

Programmes d’information pour la période des fêtes

Selon l’organisation mondiale de la santé, 32,6% de la population aux Etats-Unis est obèse – 36,5% selon le gouvernement. En Californie l’obésité ne touche « que » 24% des habitants mais dans le comté d’Orange, où se trouve Irvine, 60% des adultes sont obèses. « L’obésité a des causes multiples et les mauvais choix dans les magasins d’alimentation en sont une« , explique à l’AFP Richard Afable, président du groupe hospitalier St Joseph Hoag Health, qui organise ces journées d’information pour la troisième année de suite. Elles ont lieu pendant huit semaines avant des fêtes, quand les consommateurs ont tendance à jeter aux orties leurs bonnes résolutions pour se jeter sur la nourriture. Des programmes similaires se multiplient depuis plusieurs années à travers les Etats-Unis et plusieurs grandes chaînes de supermarchés comptent aujourd’hui des nutritionnistes parmi leur employés. De quoi redorer leur image face à la concurrence de chaînes d’épicerie haut-de-gamme. Pour les groupes médicaux privés, ces services gratuits permettent aussi de se faire connaître auprès de patients potentiels. Dans le supermarché d’Irvine, le groupe St Joseph a déployé cinq personnes. Dès l’entrée, Marina Sarwary propose aux clients de prendre leur pression artérielle, tout en dispensant ses premières recommandations. Monica Doherty et Jai Coutra, pendant ce temps, arpentent les allées, distribuant brochures et échantillons.

Junk food subventionnée

Outre la lutte contre l’obésité, ils veulent aussi apprendre aux gens à cuisiner eux-mêmes plutôt que d’acheter des aliments préparés, leur apprendre à lire les étiquettes, à manger plus de fruits et légumes, et à gérer leurs allergies alimentaires… « Nous voulons vous encourager à équilibrer votre régime alimentaire: manger des fibres et éviter les aliments industriels, limiter le sucre, arrêter le sodium« , explique M. Coutra à Sara Foronda, depuis le rayon légumes. « Je dois faire attention à ce que je mange, éviter le sucre, mais c’est difficile parce que les allées sont tapissées de biscuits« , remarque cette mère de trois enfants de 40 ans. Mike Keegan, 56 ans, fait de plus en plus attention à ce qu’il achète mais souligne que « pour bien manger, il faut souvent dépenser plus« , et qu’il ne peut pas toujours se le permettre. La nourriture saine est plus chère que les aliments industriels, particulièrement aux Etats-Unis où les cultures du maïs et du soja, ingrédients principaux de la « junk food », sont subventionnées. L’accès à une nourriture meilleure se heurte donc rapidement aux inégalités socio-économiques. Selon les observateurs, la solution sur le long terme nécessiterait de garantir à chaque américain un revenu suffisant pour acheter de la bonne nourriture à son coût réel. Cela demanderait toutefois une profonde réforme de la politique agricole américaine qui annulerait les subventions pour encourager les cultivateurs à produire à coût réel des produits de qualité, tout en finançant des mesures telles que les hausses du salaire minimum. Une idée qui semble utopique dans un avenir proche.

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