Hospitalité Carnet de route

Corsica Fairy

16.12.14

Impossible de faire un tour de France sans passer par la Corse. On s’est cru sur le Titanic en entrant, grande classe dans un ferry énorme jaune et bleu avec la tête au bandana dessus. Ça dormait de partout, on n’avait pas de sièges et on arrivait à 23h à l’Île Rousse sans aucun plan pour dormir. La Corse serait pure découverte.

Arrivés sur l’ïle, Malik, jeune apiculteur, nous a embarqués avec lui. Il était d’ici et allait faire de la randonnée vers Evisa, dans le Golo. Il nous conseillait d’aller là-bas car pour voir la Corse, il fallait aller dans les montagnes.

Du miel Corse
Il travaillait le miel. Enfin, comme il disait, ce sont les abeilles qui travaillent, il faut savoir être en accord avec elles. Ne pas trop les déranger, récolter. Lui-même se définissait comme récoltant. Depuis deux ans sa production globale de miel avait chuté de 45%, le miel de châtaigner de 50%. « En France on ne produit plus, on a axé une grosse partie de l’économie sur le service, donc on importe beaucoup, notamment des plants d’arbres d’Italie. On importe donc des problèmes, insectes, maladies, qu’on ne voyait pas avant sur l’île. Ça défonce tout. Et puis on ressent les effets du changement climatique sur la production. »

Pour lui, l’apiculture était un métier de technique et de passion. Il aimait ça. En croisant des vaches sur les bords de la route, il nous a dit en rigolant que les vaches corses sont utilisées pour faire du steak haché sans matière grasse. Véridique ! C’est un mec de Savoie qui a eu l’idée ! Nous, on découvrait la Corse. La route était vallonnée, les montagnes se découpaient au loin, au-dessus de Ponte Leccia. « Ponnté Lètch », prononcé à la Corse, « parce qu’en Corse, on est feignants, on prononce pas tout. » nous dit Malik en souriant.

Bordélique et chaleureux
Ensuite, on a rejoint Marine à Bastia, une belle ville, avec un vieux port magnifique. Des petits immeubles, parfois colorés, sinon un peu décrépis, à l’ancienne, s’agençaient les uns au-dessus des autres avec de petits balcons et le linge qui sèche. Il avait un côté bordélique organisé et chaleureux. Marine travaillait comme serveuse. Dans un resto, on a pris un menu corse, pour voir. Ça défonçait ! Pour commencer, la charcuterie corse était terrible ! Les moules à la bastiaise idem avec une sauce  aux poivrons, oignons et lardons. Quant au sanglier à la polenta, asperges, carottes, artichauts et sauce, c’était un truc incroyable et on a fini par un moelleux à la châtaigne et sa sauce à l’orange et un Sunday corse.

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Clapotis des vagues

Le jour d’après, on a rejoint Calvi en train et de là on a fait du stop avec l’idée d’aller à Porto. Une jeune fille s’est arrêtée. Elle venait de finir sa saison à Girolata, un petit village au bord de la mer, sans voitures, accessible uniquement à pied ou en bateau. « Vous y trouverez des chasseurs, des pêcheurs, de bons produits » nous dit elle. Comme on n’avait pas vraiment de plan, on a décidé de suivre cette parfaite inconnue. Nous avons emprunté la seule et unique route qui longe la mer entre Calvi et Porto, puis une piste en terre qui descendait assez raide pour arriver sur un ponton qui servait d’embarcadère pour rejoindre le village.

Là, un bateau faisait les navettes toute les heures. Sauf si on ne l’appelait pas, dans ce cas là, il ne bougeait pas. Le village était en face, de l’autre côté de la baie, on voyait la tour génoise qui en marquait l’entrée et le port. Le soleil déclinait doucement, les montagnes plongeaient carrément dans la mer. On attendait le bateau. On avait un peu de temps, c’était le moment de piquer une tête. L’eau était transparente et il n’y avait que nous trois au milieu du clapotis des vagues. Le soleil dorait les montagnes… Bonheur… Le bateau est arrivé. Le soleil continuait de baisser. Marie nous a montré le capo senino, le plus haut d’Europe, et en face la pointe de Scandola, réserve naturelle classée à l’UNESCO.

Charcuterie fromage et ti punch
A Girolata, les restos s’alignaient les uns derrière les autres sur la plage. Marie saluait tout le monde, jeunes et vieux confondus, ils déconnaient un peu puis elle nous invitait à reprendre le chemin avant de s’arrêter deux mètres plus loin pour dire bonjour à quelqu’un d’autre. Les touristes n’étaient plus vraiment présents. Marie a insisté pour qu’on goûte une planche de charcuterie fromage du bar où elle avait bossé et on a passé toute la soirée avec les saisonniers au bar à boire des ti punch pour célébrer la fin de la saison comme il se doit. On avait un bateau le soir pour retrouver le continent à Toulon. Mais avant de prendre le bateau, évidemment on a fait quelques courses à Ajaccio : Canistrelli di Mammona et saucisson de sanglier. Des figues, une terrine de Sansonnet aux myrtes, une baguette et de vieilles tomates. On a adoré la Corse!

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